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1679 vous avez été. Il y a même du péril, et vous fîtes très-sagement d’honorer de votre présence le lieu où M. de Vardes s’est baigné, plutôt que de vous opiniâtrer à gagner Valence : il faut céder à la furie des vents.

Il est venu ici un P. Morel de l’Oratoire[1], qui est un homme admirable ; il a amené Saint-Aubin[2], qui nous est demeuré. Je ne voudrois pas[3] que M. de Grignan eût entendu ce père ; il ne croit pas qu’on puisse, sans péché, donner à, ses plaisirs, quand on a des créanciers : les dépenses lui paroissent des vols qui nous ôtent le moyen de faire justice. Vraiment, c’est un homme bien salé ; il ne fait aucune composition. Mais parlons de Pauline[4] l’aimable, la jolie petite créature ! hélas ! ai-je été jamais si jolie qu’elle ? on dit que je l’étois beaucoup. Je suis ravie qu’elle vous fasse souvenir de moi : je sais bien qu’il n’est pas besoin de cela ; mais enfin j’en ai une joie sensible ; vous me la dépeignez charmante, et je crois tout ce que vous m’en dites : je suis étonnée qu’elle ne soit pas devenue sotte et ricaneuse dans ce couvent : ah ! que vous avez bien fait, ma fille, de la prendre[5] ! Gardez-la, ne vous privez pas de ce plaisir : la Providence en aura soin. Ne lui dites-vous pas qu’elle a une bonne[6] ? Seroit-il bien possible que je trouvasse encore de la place pour aimer, et de nouveaux attachements ? Je vous conseille de ne

  1. 2. Célèbre directeur de l’Oratoire. » (Note de Perrin, à la lettre du 17 novembre 1688.) — Il était le directeur de Saint-Aubin.
  2. 3. L’oncle de Mme de Sévigné.
  3. 4. « Je voudrois. » (Édition de 1754.)
  4. 5. Perrin, dans sa seconde édition, a fait ici sur Pauline (Mme de Simiane) une longue note, qui dans notre recueil sera mieux placée ailleurs, et amenée naturellement par les lettres mêmes de Mme de Simiane.
  5. 6. « Ah que vous avez bien fait de l’en retirer ! » (Édition de 1754.)
  6. 7. Une bonne maman, une grand’mère. — Cette petite phrase et la suivante ne se trouvent que dans le texte de 1734.