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Samedi 18e mai.

Vous voulez, ma chère enfant, que je n’aie plus d’inquiétude de votre santé : seroit-il possible que vos incommodités fussent venues à leur période ? Je n’ose, en vérité, me flatter de cette charmante pensée, qui me rendroit tout le reste supportable[1]. Je comprends qu’en effet vous perdez un peu que je ne sois plus à Paris : mon commerce est exact, et je ne sais point de nouvelles des rues ; il est tout naturel que vos Grignans n’aient pas les mêmes soins que moi.

J’imagine fort bien[2] la nécessité de vos dépenses d’Aix ; je me suis dit tout ce que vous me dites ; mais on vous en parle pour entendre vos raisons, qui se rapportent fort à celles qu’on a déjà pensées[3]. Je me doutai que la mort de cette mère de Mme de Dreux vous frapperoit l’imagination : je me repentis de vous l’avoir mandée[4], mais j’en étois si pleine moi-même, qu’il n’y eut pas moyen de m’en taire[5].

Vous croyez encore, ma chère enfant, sur ce que je vous ai dit que vous aviez trop d’esprit, que je vais disant une sottise, dont vous m’accusâtes à Paris, qui est de dire, comme une buse : « Ma fille est malade, parce qu’elle a trop d’esprit. » Je ne dis vraiment point de ces fadaises-là[6]. Je vous ai écrit ce que j’en pense tout bonne-

  1. 24. « Me flatter de cette pensée, qui m’adouciroit tout le reste. » (Édition de 1754.)
  2. 25. « Je comprends aussi fort bien. » (Ibidem.)
  3. 26. Le texte de 1754 donne simplement : « mais c’est pour entendre vos raisons qu’on vous en parle. »
  4. 27. « De vous l’avoir écrite. » (Édition de 1754.)
  5. 28. Voyez la lettre du 1er mai, p. 366 et 367. — À la ligne précédente, le texte de 1754 donne avoit, au lieu de eut.
  6. 29. « Vous croirez peut-être, sur ce que je. vous ai dit que vous aviez trop d’esprit, que je vais disant une sottise, qui seroit d’assurer, comme une buse, que ma fille est malade parce qu’elle a trop d’es-