Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/401

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1680 ticle, sur quoi il y auroit trop à dire ; il vaut mieux se taire mille fois ; peut-être que la Providence voudra quelque jour que nous en parlions à fond.

Nous voici donc chez M. d’Harouys, reçus et servis comme chez nous. Je crains M. de Molac[1], qui est ici, et qui viendra encore me dire vingt fois de suite, comme il fit une fois que vous y étiez : « Vous deviez bien m’avertir de ça, vous deviez bien m’avertir de ça. » Vous souvient-il de cette sottise ? En l’attendant, je lis un paquet que je reçois de vous ; c’est la seule joie que je puisse avoir, mais ce ne peut être sans beaucoup d’émotion : cela est attaché à la manière dont je vous aime. Je trouve, ma très-chère, que vous écrivez trop ; vous abusez de votre petite santé ; elle ne vous durera guère, si vous ne la ménagez pas mieux, et que vous écriviez à bride abattue ; votre délicatesse demande que vous observiez plus de mesures. Il est vrai que les sujets que vous avez traités ne souffrent pas la main d’une autre ; mais il falloit vous reposer. Je crois qu’enfin vous vous corrigerez ; et cependant je m’en vais vous répondre.

Je voudrois bien, premièrement, que vous ne me missiez point dans le nombre de ceux que vous trouvez qui souhaitoient votre départ, puisque rien ne peut m’être si dur ni si sensible que votre éloignement ; mais dites mieux, et faites-vous tout l’honneur que vous méritez : c’est que vous aimez M. de Grignan, et en vérité il le mérite ; c’est que vous êtes ravie de lui plaire ; j’ai même trouvé fort souvent que vous n’aviez pas un véritable repos, quand il étoit loin de vous. Il a une politesse et une complaisance plus capables de vous toucher et de vous

    tune de Mme de Grignan, et qu’elle aura empêché le Cardinal de faire des dispositions testamentaires qu’il semblait avoir depuis longtemps projetées. (Noe de l’édition de 1818.)

  1. 17. Voyez tome II, p. 297, note 6.