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enfin, ma chère enfant, trouvez-vous que je n’aie rien à faire[1] ?


1679

738. DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Livry, mercredi 4e octobre.

Le plaisant repos que vous avez eu à Lyon ! je l’ai prévu, ma fille, et j’ai bien compris l’accablement où vous seriez. Mon Dieu, que tout ce qui vous fatigue me fait de mal ! Vous aviez des visites qui ressembloient à celles de Paris. Je vous plains bien d’avoir été obligée de laisser la pauvre Montgobert malade. Vous aviez un temps épouvantable quand vous vous êtes embarquée : ce Rhône aura-t-il bien voulu de vous ? Quel mal vous aura fait cette tempête ! et puis la bise peut-être en arrivant à Grignan. Ma fille, on n’a jamais tout craint, quand on aime comme je fais[2]. J’attends toujours de vos nouvelles avec impatience ; vos lettres font la consolation de ma vie, et puis je meurs de peur qu’elles ne vous aient fait mal[3] en les écrivant. En vérité, mon enfant, il y a bien loin de moi à un philosophe stoïque[4] ; mais enfin c’est ma destinée, et j’y consens, puisque vous le voulez. Vous me répondez trop aimablement : il faut que je fasse ce mot exprès pour l’article de votre lettre, où vous me paroissez persuadée de toutes les vérités que je vous ai

  1. 25. Dans sa seconde édition (1754), Perrin abrége ainsi : « de cent lieues loin, et je ne trouve point avec cela que je n’aie rien à faire. »
  2. Lettre 738. 1. « On craint toujours, quand on aime comme je fais. » (Édition de 1734.)
  3. 2. « Que vous n’en soyez incommodée. » (Édition de 1754.)
  4. 3. « Stoïcien. » (Ibidem.)