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1679 Est-ce que je vous aime moins que vous ne m’aimez ? Il semble que vous m’étourdissiez par vos discours, et cependant je ne les crois point sur votre santé ; en vérité, je me perds dans ce faux repos ; et quand j’y pense bien, je trouve que j’ai tant de raison d’être en peine, que je ne sais pourquoi j’ai eu la complaisance d’être persuadée de tout ce que vous m’avez dit ; mais vous-même, ne voulez-vous point avoir quelque soin de vous rafraîchir, de vous reposer, de faire écrire pour vous ? Gardez-vous bien, ma fille, de répondre à toutes mes lettres : bon Dieu ! je ne le prétends pas ; je cause avec vous sans fin et sans mesure ; il ne faut point de réponse à tout ceci : je n’écris qu’à vous, je fais ma seule consolation de vous entretenir ; ne soyez pas si simple que d’y répondre, je ne vous écrirois plus que des billets ; le soin que j’ai de votre santé, et la persuasion du mal que vous feroit d’écrire de grandes lettres, me fait entièrement renoncer au plaisir de les lire ; ce me seroit une douleur de penser à ce qu’elles vous auroient coûté.

J’ai prié Mme de Lavardin de faire vos excuses et dire vos raisons[1] à Mme Colbert quand elle la verra. J’irai voir Mmes de Vence et de Tourette, dès que je serai à Paris, et en attendant je leur ferai faire des compliments. Le petit Coulanges a été assez malade à nos états ; il est si charmé des soins qu’on a de lui, et des députés qu’on lui envoie pour savoir de ses nouvelles, que sa fièvre n’a osé continuer ; il est si pénétré de tout cela, que c’est une pitié[2]. Mon fils brillote à merveilles ; il

  1. 13. « Et de dire vos raisons. » (Édition de 1754.) — À la ligne suivante, les mots « dès que je serai à Paris » manquent dans cette édition.
  2. 14. « Il est charmé des soins qu’on a de lui et des députés qu’on lui envoie pour savoir de ses nouvelles : sa fièvre n’a point eu de suite. Mon fils, etc. » (Édition de 1754.) — C’est sans doute aux états de Vitré de 1679 que s’adressent les adieux en huit couplets qui sont