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1679 dont il mouroit, et de la fièvre continue. Le chevalier Tabord est allé en Espagne, Schemit est demeuré[1]. En vérité, ce remède est miraculeux.

J’ai[2] bien envie de savoir comme se porte la pauvre Montgobert, le Maire, et M. de Grignan, que je ne daigne mettre au nombre des malades, puisqu’il joue à ̃l’hombre ; je souhaite bien sa santé pour l’amour de lui, mais aussi pour l’amour de vous, car quoique vous me priiez de n’être point en peine de votre peine, je vous le refuse, ma très-belle, persuadée que sa maladie vous feroit plus de mal qu’à lui. Il faut que tant de choses aillent bien pour que vous soyez en repos, qu’il n’est quasi pas possible de vous y voir. J’aimerois bien à savoir l’état où vous êtes au vrai, et combien la fatigue du voyage, les nuits sans dormir, et les agitations du carrosse ont pris sur votre pauvre personne, qui étoit déjà si abattue. Ne croyez pas qu’il soit naturel d’être sans inquiétude ; mettez-vous à ma place, et sans vous fâcher, ni dire toujours que vous vous portez parfaitement bien, jugez raisonnablement de la juste crainte que je dois avoir pour vous. Eh, mon Dieu ! quand je songe comme vous êtes pour moi, je me trouve inhumaine et grossière pour vous. Si j’étois aussi délicate que vous, je le dis à ma confusion, hélas ! ma belle, je ne vivrois pas ; et pourquoi ai-je donc tant de courage et tant d’espérance ?

  1. 11. Cette phrase n’est que dans le texte de 1734. Talbot, dont le vrai nom était, selon les uns Talbor, selon d’autres Tabor, ou, comme l’écrit Mme de Sévigné, Tabord (voyez tome V, p. 559, note 1), était parti pour l’Espagne en qualité de premier médecin de la jeune reine. Nous lisons dans la Gazette du 7 octobre que celle-ci ayant appris à Poitiers que le comte de Montaigu, lieutenant gérerai de Guienne, était malade à Bordeaux, lui avait envoyé en poste le chevalier Talbot, son premier médecin. Schemit (ou plutôt Schmit ? ) doit être un autre docteur, employant le remède anglais.
  2. 12. Cet alinéa manque tout entier dans l’édition de 1754.