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1680le Roi, mais c’est sans bassesse : ce n’est point comme étant au-dessous de ce qu’elle est[1], c’est comme ayant été choisie et distinguée dans toute l’Europe. Elle a l’air fort noble, et beaucoup de dignité et de bonté ; elle aime les vers, la musique, la conversation ; elle est fort bien quatre ou cinq heures dans sa chambre paisiblement à ne rien faire[2] ; elle est étonnée de l’agitation qu’on se donne pour se divertir ; elle a fermé la porte aux moqueries et aux médisances. L’autre jour, la duchesse de la Ferté vouloit lui dire une plaisanterie, comme un secret, sur cette pauvre princesse Marianne[3], dont la misère est à respecter ; Madame la Dauphine lui dit avec un air sérieux : « Madame, je ne suis pas curieuse, » et ferme ainsi la porte, c’est-à-dire la bouche, aux médisances et aux railleries[4]. Mmes de Richelieu, de Rochefort et de Maintenon me firent beaucoup d’honnêtetés, et me parlèrent de vous. Mme de Maintenon, par un hasard, me fit une petite visite d’un quart d’heure, où elle me conta[5] mille choses de Madame la Dauphine, et me parla encore de vous[6], de votre santé, de votre esprit, du goût que vous avez l’une pour l’autre, de votre Provence, avec autant d’attention qu’à la rue des Tour-

  1. 3. « De ce qu’elle est aujourd’hui. » (Édition de 1754.)
  2. 4. « Quatre ou cinq heures toute seule dans sa chambre. » (Ibidem.)
  3. 5. La princesse de Conti (Marie-Anne) : voyez la lettre du 22 mars précédent, p. 323 et la note 20. Est-ce une allusion plaisamment hyperbolique à la Marianne, si malheureusement mariée, de la Cléopatre et de la tragédie de Tristan ? — Voyez sur la duchesse de la Ferté, tome V, p. 499, note 4.
  4. 6. Cette fin de phrase : « et ferme ainsi, etc., » n’est que dans notre manuscrit.
  5. 7. « Une petite visite d’un quart d’heure ; elle me conta, etc. » Édition de 1754.)
  6. 8. « Et me reparla de vous. » (Ibidem.)