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1680 tirerai point de fâcheuses conséquences pour votre amitié : il n’en est pas de même de mes misérables petites étrennes ; dès que je ne vous aimerai plus, elles deviendront vertes comme du pré ; observez-les bien, ma fille, je me suis livrée à cette marque indubitable et sans que je prenne le soin de vous parler jamais de mon amitié, vous en saurez la vérité. Je vous remercie donc de votre joli présent, et je reçois comme une marque de votre tendresse le cas que vous faites du mien, quoique petit et inutile. Voilà les seuls chagrins que me donne ma médiocre fortune ; mais ils ne sont pas médiocres comme elle : j’en suis pénétrée, et je regarde l’abondance de Mme de Verneuil comme un plaisir fort au-dessus de sa principauté[1]. Je viens de lui écrire ; je n’y avois pas encore pensé. Je n’ai point vu M. de Gordes ; j’irai le chercher. Au reste, vous n’avez pas bien chaussé vos besicles sur les prophéties que vous faites : vous verrez toujours Mmes de Créquy et de Richelieu dames d’honneur ; ce choix est trop bon pour leur donner des compagnes ; jamais le Roi n’a eu dessein de donner les entrées et les honneurs[2] à Mme de Soubise, et c’est pour l’avoir cru et l’avoir dit, qu’elle est à Paris ; car lorsqu’elle trouva dans l’explication que tout cela se réduisoit à une augmentation de pension de dix mille francs, elle se plaignit et parla : voilà ce qui nous a paru. Les bons offices de ce pays-là n’ont pas manqué d’être placés généreusement

  1. 2. Voyez tome II, p. 52, note 1. — Mme de Verneuil, d’après Saint-Simon, eut même les honneurs de princesse du sang, mais en 1692 pour la première fois. « De son second mari, elle n’eut point d’enfants et devint princesse du sang longtemps après sa mort (la mort de son mari, 1682), à titre de sa veuve. Le Roi en prit le deuil (de Mme de Verneuil) pour quinze jours, mais il ne lui fit faire aucun honneur particulier à ses obsèques. » Saint-Simon, tome IV, p. 281 ; voyez encore le tome I des Mémoires, p. 31.
  2. 3. Le texte de 1754 ajoute : « de cette place. »