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1676 frappée en même temps qu’elle, et reçut hier le viatique à Paris, où elle revint[1]. Beaujeu, la demoiselle de Mme de Coulanges, fut frappée du même trait : elle a toujours suivi sa maîtresse ; pas un remède n’a été ordonné dans la chambre, qui ne l’ait été dans la garde-robe : un lavement, un lavement ; une saignée, une saignée ; Notre-Seigneur, Notre-Seigneur ; tous les redoublements, tous les délires, tout étoit pareil ; mais Dieu veuille que cette communauté se sépare ! car on vient de donner l’extrême-onction à Beaujeu, et elle ne passera pas la nuit. Nous craignons demain le redoublement de Mme de Coulanges, parce que c’est celui qui figure avec celui qui emporte cette pauvre fille. En vérité, c’est une terrible maladie ; mais ayant vu de quelle façon les médecins font saigner rudement une pauvre personne, et sachant que je n’ai point de veines, je déclarai hier au premier président de la cour des aides[2], qui me vint voir, que si je meurs jamais[3], je le prierai de m’amener M. Sanguin[4] dès le commencement : j’y suis très-résolue. Il n’y a qu’à voir ces messieurs pour ne vouloir jamais les mettre en possession de son corps : c’est de l’arrière-main qu’ils ont tué Beaujeu. J’ai pensé vingt fois à Molière depuis que j’ai vu tout ceci. Cependant j’espère que cette pauvre femme échappera, malgré tous leurs mauvais traitements : elle est assez tranquille,

    et grande autorité dans sa famille, à qui elle laissa trois millions de biens. » (Saint-Simon, tome II, p. 223.) — La chancelière le Tellier était tante de Mme de Coulanges.

  1. 2. « Et revint en diligence à Paris, où elle reçut hier le viatique. » (Édition de 1754.)
  2. 3. Le Camus. Voyez tome II, p.139, note 16.
  3. 4. « Si je suis jamais en danger de mourir. » (Édition de 1754.)
  4. 5. Médecin, sans doute ennemi de la saignée : voyez la lettre du 3 septembre 1688.