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1678 ici. Comme je ne crovois pas qu’il y seroit quand je vous mandai les gens avec qui je passerois l’hiver, je ne vous en écrivis rien ; cependant vous le connoissez, et vous savez le plaisir qu’il y a d’être avec lui ; je lui montrai votre lettre, qu’il trouva belle et jolie ; et sur cela que ne dit-il pas de vous ? M. Jeannin et moi soupâmes chez lui, et il nous porta votre santé ; il me pria de vous le mander, et que personne ne vous estimoit plus qu’il faisoit. M. Jeannin me dit la même chose, et y ajouta le mot d’aimait ; car vous savez que sur le chapitre des dames il n’est pas tout à fait si régulier que les évêques.


à corbinelli.

Votre lettre m’a touché comme tout ce qui vient de vous, Monsieur : c’est la conversation d’un honnête homme et d’un homme d’esprit ; mais j’en voudrois de plus fréquentes que celles des lettres. Si vous étiez ici, nous y passerions la vie plus doucement qu’à Paris, et nous y raisonnerions plus tranquillement qu’on ne fait en ce pays-là.

Nous ne sommes pas de votre opinion, Mme de Coligny et moi sur la critique que vous faites de la maxime qui dit que la bonne grâce est au corps ce que le bon sens est à l’esprit. Nous croyons que M. de la Rochefoucauld veut dire que le corps sans la bonne grâce est aussi désagréable que l’esprit sans le bon sens ; et nous trouvons cela vrai. Nous croyons encore qu’il y a de la différence entre la bonne grâce et le bon air ; que la bonne grâce est naturelle, et le bon air acquis ; que la bonne grâce est jolie, et le bon air beau ; que la bonne grâce attire l’amitié, et le bon air l’estime.

Monsieur d’Autun, à qui j’ai fait voir votre lettre et nos décisions, a trouvé celle-ci juste, et n’approuvoit