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1678 prochain, après notre retour d’Auvergne, où nous allons ma fille et moi. Si les plus honnêtes gens de la cour étoient assez aises de me voir pendant que j’y étois, vous jugez bien que l’on me compte[1] avec plaisir en province, et vous savez mieux que personne combien ces petites régences-là sont agréables. Après tout ce que je viens de vous conter, Madame, trouvez-vous que nous nous ennuyions ?

Je crois que M.  et Mme de Guitaut ne gâteroient rien, s’ils se trouvoient parmi nous, et que même on seroit fort aise de les voir, s’ils vivoient bien avec tout ce que je viens de vous nommer de gens ; pour moi, qui suis aussi honnête qu’un autre, je les recevrois le mieux que je pourrois quand ils me viendroient voir à Bussy ou à Chaseu ; mais comme il faut un commencement à toutes choses, j’ai trouvé fort ridicule que M. de Guitaut, jadis mon cornette[2], ait cru qu’il n’y avoit pas toujours eu jusques à présent pour le moins autant de différence entre lui et moi, qu’il y en avoit il y a trente ans. Vous dites que quand je viens à Forléans, il est fort naturel que j’aille à Époisse, et je vous réponds que quand M. de Guitaut vient à Époisse et qu’il apprend que je suis à Bussy, il est bien plus naturel et plus raisonnable à lui d’y venir.

Vous dites que quand il me trouvera en quelque lieu il me fera mille honnêtetés, et je vous réponds que je lui en ferai deux mille[3] ; mais comme vous dites qu’il commencera là, je vous dis qu’il faut aussi qu’il commence ailleurs. Pour moi je n’ai aucun chagrin contre lui ; mais une marque qu’il en a contre moi, c’est qu’il ne me vient

  1. 18. « Que l’on m’écoute. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.)
  2. 19. Dans les chevau-légers de Monsieur le Prince, dont Bussy était capitaine-lieutenant.
  3. 20. « Quatre mille. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.)