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1678 trouvée trop heureuse qu’un honnête homme ait voulu une si petite chose qui dépendoit de moi. J’étois sur le point de l’en remercier, lorsque j’ai vu qu’il ne tenoit qu’à moi d’en recevoir un remerciement de vous. Mais je ne veux point vous tromper, mon cher cousin, ni vous faire valoir ce qui n’en vaut pas la peine, et ce que je n’ai point fait pour l’amour de vous.

Je suis encore d’accord de ce que vous dites de la Princesse de Clèves ; votre critique et la mienne étoient jetées dans le même moule.

Tout le monde s’est remis à croire la paix. Le roi de Suède prie le Roi de vouloir bien la faire sans s’attacher davantage à ses intérêts. Les Hollandois se sont chargés de cette négociation ; et cela fait croire que toutes les louanges en vers et en prose qu’on a données au Roi sur cette paix se retrouveront à leur place. Mais que dites-vous de M. d’Albret[1] qui alloit voir amoureusement et nocturnement Mme de Lameth[2] à la campagne ? On l’a pris pour un voleur, on l’a tué sur la place. Voilà une étrange aventure.

Adieu, mon cousin adieu, ma jolie veuve[3] si ma tante m’avoit donné les dix mille écus dont vous me parliez

  1. 2. Charles Amanieu d’Albret, sire de Pons, comte de Marennes, dit le marquis d’Albret, mestre de camp du régiment de Navarre. Bussy Lameth, instruit de ses liaisons avec sa femme, le surprit dans un rendez-vous au château de Pinon en Picardie, et le tua (5 ou 6 août 1678). Le marquis d’Albret était neveu du chevalier d’Albret qui tua en duel le marquis de Sévigné, le 4 février 1651. Il avait épousé Marie d’Albret, sa cousine, fille unique du maréchal, qui, restée veuve sans enfants, épousa en 1683 Charles de Lorraine, comte de Marsan. — Le château de Pinon était près de Laon, dans l’Aisne. »
  2. 3. N. de Rouci, femme du comte de Bussy Lameth. Voyez la lettre du 18 septembre suivant, p. 483 et 484.
  3. 4. Dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale, une autre main a écrit en marge « : Mme de Coligny. » Ce manuscrit termine ainsi la lettre : « et en ce cas-là, je suis attrapée. »