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1678 car cette place est farcie de gens de guerre, quoiqu’il en soit sorti deux mille hommes pour aller à Bruges, parce qu’on ne sait jamais où le Roi tombera. Toutes les villes tremblent. Je crois que de tout ceci nous aurons la paix ou la Flandre,

Mais parlons de Mme de Seignelay[1] qui mourut avant-hier matin grosse d’un garçon. La fortune a fait là un coup bien hardi, d’oser fâcher M. Colbert. Lui et toute sa famille sont inconsolables. Voilà un beau sujet de méditation. Cette grande héritière tant souhaitée, et prise enfin avec tant de circonstances, est morte à dix-huit ans. La princesse de Clèves n’a guère vécu plus longtemps ; elle ne sera pas sitôt oubliée. C’est un petit livre que Barbin nous a donné depuis deux jours, qui me paroît une des plus charmantes choses que j’aie jamais lues[2]. Je crois que notre chanoinesse[3] vous l’enverra bientôt. Je vous en demanderai votre avis, quand vous l’aurez lue[4] avec l’aimable veuve. Il me semble qu’il est encore de bonne heure pour être allés à Cha-

  1. 8. Marie-Marguerite d’Alègre, fille unique du marquis d’Alègre, morte le 16 mars 1678. Le marquis de Seignelay l’avait épousée le 8 février 1675 (voyez tome II, p. 240, note 5). Elle lui avait apporté en dot le marquisat d’Alègre, et elle ne laissa qu’une fille nommée Marie-Jeanne Colbert, marquise d’Alêgre, qui mourut en bas âge, en 1680 : le marquisat fut recueilli par Emmanuel d’Alègre, frère cadet du père de Mme de Seignelay. (Note de l’édition de 1818.)
  2. 9. L’achevé d’imprimer de la première édition de la Princesse de Clèves de Mme de la Fayette est du 8 mars 1678. Le roman se termine par ces mots : « Sa vie (la vie de la princesse de Clèves), qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables. »
  3. 10. La fille de Bussy, chanoinesse de Remiremont.
  4. 11. Le manuscrit de la Bibliothèque impériale donne lu, au masculin, se rapportant à livre ; trois lignes plus loin, « assurément » ne se trouve pas dans ce manuscrit ; à la ligne d’après, « de soleil » a été corrigé en « du soleil, » de la main de Bussy, dans les deux manuscrits.