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1678

681. — DE CORBINELLI AU COMTE DE BUSSY RABUTIN.

Le même jour que j’écrivis cette lettre (du 12 février, no 682, p. 415), je reçus celle-ci de Corbinelli.
À Paris, ce 8e février 1678[1].

Nous avons lu, Monsieur, avec un plaisir sensible, votre campagne de Mardick. Je ne me lasse point d’admirer la noble facilité qui est répandue dans tout ce que vous faites ; mais ce qui me touche plus particulièrement[2], c’est l’éloignement que vous avez de toutes sortes d’affectations et d’inutilités dans votre style ; sur quoi, quand vous me tueriez, je ne m’empêcherois pas de citer le maître en ce genre, le divin Horace, dont vous savez les préceptes[3] dans l’expérience et dans la nature plus qu’en lui-même, quoiqu’il ne les ait puisés que dans ces deux sources :

Est brevitate opus, ut currat sententia, neu se
Impediat verbis lassas onerantibus aures.
[4]

Je n’ai vu encore personne qui fasse mieux voir que vous tout d’un coup sa pensée, et qui la fasse voir uniquement. J’ai traduit le mot de sententia par celui de pensée

  1. Lettre 681. — 1. Cette lettre est datée du 12e dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale.
  2. 1. « Mais ce qui me touche particulièrement. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.)
  3. 3. Tel est le texte des deux manuscrits et de l’édition de 1697 ; dans celle de 1818, il y a un mot de plus : « dont vous savez puiser les préceptes, » À la ligne suivante, le manuscrit de la Bibliothèque impériale donne puisés, et le nôtre prises, qui est une faute pour pris ou pour puisés.
  4. 4. Horace, livre I, satire X, vers 9 et 10. — « Il est besoin de brièveté, pour que la pensée coure et ne s’embarrasse pas de mots qui surchargent et fatiguent les oreilles. » À la fin du premier vers, notre manuscrit donne neuve, pour neu se.