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1677

671. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE DE BUSSY RABUTIN.

Cinq semaines après que j’eus écrit cette lettre (no 669, p. 383), je reçus celle-ci de Mme de Sévigné.
À Paris, ce 8e décembre 1677.

La belle Madelonne est ici[1] ; mais comme il n’y a pas un plaisir pur en ce monde, la joie que j’ai de la voir est fort troublée par le chagrin de sa mauvaise santé. Imaginez-vous, mon pauvre cousin, que cette jolie petite personne, que vous avez trouvée si souvent à votre gré, est devenue d’une maigreur et d’une délicatesse qui la rend une autre personne ; et sa santé est tellement altérée, que[2] je ne puis y penser sans en avoir une véritable inquiétude. Voilà ce que le bon Dieu me gardoit, en me redonnant ma fille. Je ferois des réflexions d’ici à demain. Il vaut mieux vous demander des nouvelles de notre heureuse veuve, comment elle se trouve de sa fièvre quarte, et si l’hiver, joint avec ce triste mal, ne fait pas un grand trouble à la tranquillité de sa vie. Il n’y en a guère qui soit exempte de nuage. Je vous la recom-

  1. Lettre 671. — 1. C’est la première mention de l’arrivée de Mme de Grignan. Elle était sans doute à Paris depuis plusieurs jours. Nous avons vu plus haut (p. 381) que sa mère l’attendait dès le 3 novembre. La suite de la phrase est un peu différente dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : « mais comme il n’y a point de plaisir pur en ce monde, la joie que j’ai de la voir est extrêmement troublée, etc. »
  2. 2. « Que l’on ne peut y penser sans en avoir une véritable inquiétude, pour peu qu’on y prenne intérêt. » (Manuscrit de la Bibliothèque impériale.) — À la ligne suivante, le même manuscrit porte : « je ferois sur cela des réflexions, etc. ; » deux lignes après : « comme elle se trouve de sa fièvre quartaine, et si l’hiver, joint avec ce triste mal, ne fait point de trouble à la tranquillité de sa vie. Il n’y en a guère qui soit exempte de quelque nuage. »