1677
644. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DU COMTE DE GUITAUT À MADAME DE GRIGNAN.
Je vous écrivis hier au soir, et je vous écris encore aujourd’hui. Enfin j’ai quitté Époisse ; mais je n’ai pas quitté encore le maître de ce beau château ; il est venu me conduire jusqu’ici. Il n’y a rien de si aisé que de l’aimer[2] : vous le connoissez ; il m’a aussi bien reçue chez lui que si j’étois Mme de Grignan : je ne puis rien ajouter à cette louange, j’ai tout dit. Mais il n’est pas vrai, Monsieur le comte de Guitaut[3] ?
Enfin nous nous séparons demain, et je commence à penser à vous, en quittant Mme de Sévigné ; car tant que nous avons été ensemble, je n’ai fait qu’en parler, et je ne doute pas que les oreilles ne vous aient corné : c’est à vous à savoir laquelle, car nous en avons dit de toutes les façons. Je n’ai pu[4] me résoudre à ne pas coucher encore cette nuit avec elle, et je la suis venu accompagner jusqu’au premier gîte. Enfin encore une fois, nous nous quittons à regret, ce me semble ; mais nous nous reverrons dans peu ; et si vous ne venez, nous vous irons voir de compagnie. Tenez-vous toujours le cœur joyeux, et
- ↑ Lettre 644 (revue sur une ancienne copie). — 1. À sept lieues de Semur, dans le département de la Côte-d’Or.
- ↑ 2. « Rien n’est si aisé que de l’aimer. » (Édition de 1754.)
- ↑ 3. « Je ne puis rien ajouter à cela ; j’ai tout dit ; n’est-il pas vrai, Monsieur le Comte ? Répondez. » (Ibidem.)
- ↑ 4. « Je n’ai pu me résoudre à ne pas l’accompagner jusqu’à son premier gîte. Nous nous quittons, ce me semble, à regret. » (Ibidem.)