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1676

602. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, mercredi 9e décembre.

Voici encore une lettre qu’il faut que je vous écrive à Lyon. J’attends ce soir de vos nouvelles : je ferai un étrange bruit, si j’apprends que vous ayez différé votre départ. Je m’en vais vous gronder, ma fille, de deux ou trois choses : vous ne m’avez pas mandé comment vous avez trouvé la petite religieuse à Sainte-Marie[1] : vous savez que je l’aime fort joliment ; vous ne m’avez point parlé de l’affaire de vos procureurs du pays. J’ai oublié la troisième : si elle me revient, elle vous reviendra. Je fais bien d’être ainsi méchante pendant que vous êtes à Lyon ; car vous ne serez pas assez fâchée pour vous en retourner à Grignan ; mais si vous étiez encore à Aix, vous me croiriez de si mauvaise humeur que vous ne viendriez point me voir. Je vous dirai que pour me venger, je viens d’envoyer à M. de Grignan un paquet de M. de Pompone, tout rempli d’agrément et de douceurs. M. de Pompone a glissé fort à propos nos cinq mille francs. Le Roi dit en riant : « On dit tous les ans que ce sera pour la dernière fois. » M. de Pompone, en riant, répliqua : « Sire, ils sont employés à vous bien servir. » Sa Majesté apprit aussi que le marquis de Saint-Andiol[2] étoit procureur du pays ; le sourire continua, comme disant qu’on voyoit bien la part qu’avoit M. de Grignan à cette nomination. M. de Pompone lui dit : « Sire, la chose a passé d’une voix sans aucune contes-

    mine la lettre ainsi : « de vous entendre conter bien des choses, et de vous embrasser de tout mon cœur. »

  1. Lettre 602. — 1. Marie-Blanche de Grignan.
  2. 2. Voyez tome II, p. 116, note 13. — Le marquis de Saint-Andiol mourut en 1685 ; voyez la lettre du 8 juillet 1685.