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1676à propos dans l’état où nous sommes : il est bien vrai que le seul amour de Dieu peut nous rendre contents en ce monde et en l’autre ; il y a longtemps que l’on le dit ; mais vous y avez donné un tour qui m’a frappée.

C’est un beau sujet de méditation que la mort du maréchal de Rochefort : un ambitieux dont l’ambition est satisfaite, mourir à quarante ans ! c’est une chose digne de réflexion[1]. Il a prié en mourant la comtesse de Guiche[2] de venir reprendre sa femme à Nancy, et lui laisse le soin de la consoler. Je trouve qu’elle perd par tant de côtés, que je ne crois pas que ce soit une chose aisée.

Voilà une lettre de Mme de la Fayette qui vous divertira. Mme de Brissac venoit ici pour une certaine colique ; elle ne s’en est pas trouvée bien : elle est partie aujourd’hui de chez Bayard, après y avoir brillé, et dansé, et fricassé chair et poisson. Le chanoine m’a écrit ; il me semble que j’avois échauffé sa froideur par la mienne ; car je la connois, et le moyen de lui plaire, c’est de ne lui rien demander. C’est le plus bel assortiment de feu et d’eau que j’aie jamais vu, Mme de Brissac et elle. Je voudrois avoir vu cette duchesse faire main basse dans la place des Prêcheurs[3] sans aucune considération de qualité ni d’âge : cela passe tout ce que je croyois[4]. Vous êtes une plaisante idole. ; sachez qu’elle trouveroit fort bien à vivre où vous mourriez de faim.

Mais parlons de la charmante douche ; je vous en ai fait la description ; j’en suis à la quatrième ; j’irai jusqu’à

  1. Lettre 544. — « C’est quelque chose de bien déplorable. » (Édition de 1754.)
  2. La comtesse de Guiche et la maréchale de Rochefort étaient cousines, comme petites-filles, par leurs mères, du chancelier Seguier.
  3. Place publique à Aix. (Note de Perrin.)
  4. « Tout ce que l’on peut croire. » (Édition de 1754.)