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1676n’est demeuré d’autre emploi à son camarade[1] que d’adorer la belle que vous savez, sans envieux et sans rivaux. Je vous embrasse assurément de tout mon cœur


    Longueville à Munster ; puis il retourna en Suède et s’attacha à la reine Christine, qui le fit noble suédois. Après l’abdication de Christine, il fut ambassadeur du roi Charles-Gustave, son successeur. Enfin Louis XIV le nomma son résident général vers les princes et États du Nord. Ami de Louvois, il fut envoyé au congrès de Cologne avec Barrillon et le duc de Chaulnes, et en ce moment (1676) il allait en Angleterre pour gagner le Parlement (voyez l’Histoire de M. Rousset, tome II, p. 278 et suivantes). Il avait épousé Marie-Salomé de Bauvers, dont il n’eut point d’enfants, et mourut en 1703. On a de lui des traités de la Civilité, du Point d’honneur, de la Paresse, de la Jalousie, et une traduction du traité de la Guerre et de la Paix de Grotius. « C’étoit, dit Saint-Simon, un très-petit homme, qui paroissoit avoir eu le visage agréable et qui avoit été fort galant. Il avoit beaucoup d’esprit, de grâces et de tour, mais rien de guindé, extrêmement l’air et les manières du grand monde, avec lequel il avoit passé sa vie dans les meilleures compagnies, sans aucune fatuité ni sortir jamais de son état. Poli, sage, ouvert quoique en effet réservé, modeste et respectueux, surtout les mains fort nettes et fort homme d’honneur. Il brilla de bonne heure au conseil et devint intendant de Picardie. M. de Chaulnes, qui y avoit toutes ses terres, et qui étoit fort de ses amis, les lui recommanda beaucoup ; et Courtin se fit un grand plaisir de les soulager. L’année suivante, faisant sa tournée, il vit que, pour faire plaisir au duc de Chaulnes, il avoit surchargé d’autres paroisses. La peine qu’il en eut lui fit examiner le tort qu’il leur avoit fait, et il trouva qu’il alloit à quarante mille livres. Il n’en fit point à deux fois, il les paya et les répartit de son argent, puis demanda à être rappelé. Il signa les traités de Heilbronn, de Breda, et plusieurs autres, et fut longtemps et utilement ambassadeur en Angleterre, où, par Mme de Portsmouth, il faisoit faire au roi Charles II tout ce qu’il vouloit…. Courtin avoit gagné à ses ambassades la liberté de paroître devant le Roi, et partout, sans manteau, avec une canne et son rabat…. Jamais il ne paroissoit au souper du Roi, une ou deux fois la semaine, que le Roi ne l’attaquât aussitôt de conversation qui d’ordinaire duroit le reste du souper. » Voyez Saint-Simon, tomes I, p. 392 et suivante ; II, p. 298 IV, p. 217 et suivantes.

  1. S’agit-il de Colbert, marquis de Croissy, ou de Barrillon, qui avait été à Cologne avec Courtin et le duc de Chaulnes ?