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1676ma fille, et la réponse à la princesse. C’est un extrême plaisir pour moi que de savoir de vos nouvelles ; mais il me semble que je n’en sais jamais assez : vous coupez court sur votre chapitre, et ce n’est point ainsi qu’il faut faire avec ceux que l’on aime beaucoup. Mandez-moi si la petite est à Sainte-Marie[1] : encore que mon amour maternel soit demeuré au premier degré, je ne laisse pas d’avoir de l’attention pour les pichons. On m’écrit cent fagots de nouvelles de Paris, une prophétie de Nostradamus qui est étrange, et un combat d’oiseaux en l’air, dont après un long combat il en demeure vingt-deux mille sur la place : voilà bien des alouettes prises. Nous avons l’esprit dans ce pays de n’en rien croire.

Adieu, ma très-chère fille : croyez que de tous ces cœurs où vous régnez, il n’y en a aucun où votre empire soit si bien établi que dans le mien ; je n’en excepte personne. J’embrasse le Comte après l’avoir offensé.

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514. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ, ET DE LA PETITE PERSONNE SOUS LA DICTÉE DE MADAME DE SÉVIGNÉ, À MADAME DE GRIGNAN.
Aux Rochers, dimanche 15e mars.

Je suis au désespoir de toute l’inquiétude que je vous donne. On souffre bien des douleurs inutiles dans l’éloignement, et jamais notre joie ni notre tristesse ne sont à leur place. Ne craignez point, ma fille, que j’abuse de mes

  1. Blanche d’Adhémar, fille aînée de Mme de Grignan, née le 15 novembre 1670, n’avait alors que cinq ans et quatre mois. Elle fut élevée dans le couvent des filles de la Visitation d’Aix, où elle prit l’habit.