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1675Géran[1] ? N’est-elle pas assez sage pour vivre sur sa réputation ? Que deviendroient ses épargnes, si elle ne les dépensoit ?

J’ai reçu des lettres de Nantes : assurément si Lavardin et d’Harouys faisoient l’article de la Gazette[2], vous y auriez vu mon arrivée et mon départ. Je vous rends bien, ma très-chère, l’attention que vous avez à la Bretagne : tout ce qui vous entoure à vingt lieues à la ronde m’est considérable. Il vint l’autre jour ici un Augustin ; c’est une manière de fraté[3] ; il a été par toute la Provence ; il me nomma cinq ou six fois M. de Grignan et Monsieur d’Arles ; je le trouvois fort habile.homme : je suis assurée qu’à Aix je ne l’aurois pas regardé.

À propos, vous ai-je parlé d’une lunette admirable qui faisoit notre amusement dans le bateau ? C’est un chef-d’œuvre ; elle est encore plus admirable que celle que l’abbé vous a laissée à Grignan. Cette lunette rapproche fort bien les objets de trois lieues ; que ne les approche-t-elle de deux cents ! Vous pouvez penser l’usage que nous en faisions sur ces bords de Loire ; mais voyez celui que j’en fais ici : c’est que par l’autre bout elle éloigne aussi, et je la tourne sur Mlle du Plessis, et je la trouve tout d’un coup à deux lieues de moi. Je fis l’autre jour cette sottise sur elle et sur mes voisins ; cela fut fort plaisant, mais personne ne m’entendit : s’il y avoit eu

  1. Mme de Saint-Géran était parente et amie de Mme de Villars ; elle avait été élevée comme celle-ci chez la maréchale de Bellefonds. Le gros Saint-Géran était cousin des Villars. Voyez Walckenaer, tome V, p. 354, 355.
  2. « Faisoient l’article de cette ville dans la Gazette. » (Édition de 1754.)
  3. Fraté, frater. En écrivant ainsi le mot, Mme de Sévigné n’est point d’accord avec l’Académie qui, dans la dernière édition de son Dictionnaire, veut qu’on prononce le R final.