1672
contents de votre relation, mais surtout de l’histoire tragique. Elle est contée en perfection : nous avons peur que vous n’ayez tué cette pauvre Diane pour faire un beau dénouement. Nous voulons pourtant vous en croire, et vous remercier d’avoir fait chasser l’amant de votre chambre ; si vous l’eussiez fait jeter dans la mer, vous auriez encore mieux fait : sa barbarie est fort haïssable, et le mauvais goùt de Diane nous console quasi de sa mort ; son âme devroit bien revenir à l’exemple de celle de M. de Bourdeville[1]. Je vous ai mandé sa mort : il ne voulut point se confesser, et envoya tout au diable, et lui après : son corps est en dépôt à Saint-Nicolas ; le peuple s’est mis dans la tête que son âme revient la nuit tout en feu dans l’église ; qu’il crie, qu’il jure, qu’il menace ; et là-dessus ils veulent jeter le corps à la voirie, et assassiner le curé qui l’a reçu. Cette folie est venue à tel point, qu’il a fallu ôter le corps habilement de la chapelle, et faire venir la justice pour défendre de faire insulte au curé. Voilà qui est tout neuf d’hier au matin, mais cela n’est point digne de déchausser votre histoire amoureuse.
Nous attendons demain notre petit Coulanges. Je fus hier lever pour bien de l’argent d’étoffes chez-Gautier[2], pour me faire belle en Provence. Je ne vous ferai nulle honte : vous verrez un peu quels habits je porterai. Je
- ↑ 4. On lit Bourdeville dans le manuscrit ; mais il s’agit très-probablement ici du vieux Bourdeille, mort à Paris le 8 mai 1672, et dont Mme de Sévigné parle le 13 juin suivant : voyez sa lettre et les notes. On était esprit fort dans cette famille de Brantôme ; le comte de Matha avait poussé loin l’irréligion, et, à en juger par un mot qu’on lui prête au lit de mort, ne dut pas faire une fin plus édifiante que celle de son cousin Bourdeille. Voyez les Mémoires de Retz, tome II, p. 124, et M. Paulin Paris, tome VI. p. 78. de Tallemant des Réaux.
- ↑ 5. Voyez la note 15 de la lettre 276.