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1672


ne lui donne point ; en attendant, ma bonne, je m’en vais causer avec vous.

J’ai vu ce matin M. de Marignanes[1] ; je l’ai pris pour M. de Maillanes[2] : je me suis embarrassée ; enfin, pour avoir plus tôt fait, je l’ai prié de me démêler ces deux noms. Il l’a fait en galant homme ; il a compris qu’il étoit très-possible que je les confondisse ; il m’a remise ; il est fort content de moi, et moi fort contente de lui. Il a vu et baisé votre fille ; il dit que son frère est beau comme un ange, et vous comme deux. Il admire votre esprit, votre personne, il adore M. de Grignan. Voilà qui est fait.

Je dînai hier chez la Troche avec l’abbé Arnauld et Mme de Valentiné[3]. Après dîner nous eûmes le Camus, son fils et Ytier[4] : cela fit une petite symphonie très-parfaite.

Après cela Mlle de Grignan arrive avec son écuyer, c’étoit Beaulieu ; sa gouvernante, c’étoit Hélène ; sa femme de chambre, c’étoit Marie ; son petit laquais, c’étoit Jacquot, fils de la nourrice ; et sa nourrice, c’étoit mère Jeanne avec ses habits des dimanches : c’est la plus aimable femme de village que j’aie jamais vue. Tout cela parut beaucoup. On les envoya au jardin, on les regarda fort : j’aime trop tout ce petit ménage-là. Mme du Puy-du-Fou

  1. Lettre 279 (revue sur une ancienne copie). — 1. Joseph Gaspard Couet, marquis de Marignanes, mort en 1692. Il fut premier consul d’Aix.
  2. 2. Voyez la note 6 de la lettre 144.
  3. 3. Nous ne trouvons sur elle que ce passage des Mémoires de l’abbé Arnauld (tome XXXIV, p. 354) : « J’en partis le lendemain (de Tours, en octobre 1672), avec M. le marquis de Vassé, et M. de Valentiné qui nous mena en sa belle maison d’Ussé, où je passai deux jours avec la bonne compagnie qu’on y trouve d’ordinaire, mais dont Mme de Valentiné fait toujours la meilleure partie. »
  4. 4. Voyez tome II, p. 95 et 165.