1672
Mandez-moi, je vous prie, ce qu’il y a entre la princesse d’Harcourt[1] et vous ; Brancas est désespéré de penser que vous n’aimez point sa fille : Monsieur d’Uzès a promis de remettre la paix partout ; je serai bien aise de savoir de vous ce qui vous a mises en froideur.
J’ai été chez M. de Bertillac[2] pour votre pension. Il faudra que je parle à M. Colbert : c’est une affaire présentement : on détourne tous les fonds ; il faut solliciter ce qui n’étoit pas une affaire autrefois. Voici un brave homme.
Vous me dites que la beauté de votre fils diminue, et que son mérite augmente. J’ai regret à sa beauté, et me réjouis qu’il aime le vin : voilà un petit brin de Bretagne et de Bourgogne, qui fera un fort bel effet, avec la sagesse des Grignans. Votre fille est tout au contraire : sa beauté augmente, et son mérite diminue. Je vous assure qu’elle est fort jolie, et qu’elle est opiniâtre comme un petit démon ; elle a ses petites volontés et ses petits desseins ; elle me divertit extrêmement ; son teint est admirable, son corps est comme celui du petit Jésus de ma chambre, ses yeux sont jolis et bleus, ses cheveux noirs ; son nez ni beau ni laid ; son menton, ses joues, son tour de visage, très-parfaits ; je ne dis rien de sa bouche, elle s’accommodera ; elle a un joli ton de voix. Mme de Coulanges trouvoit qu’il pouvoit fort bien passer par sa bouche.
Je pense, ma fille, qu’à la fin je serai de votre avis ; je trouve des chagrins dans la vie qui sont insupportables ;
- ↑ 12. Françoise de Brancas : voyez la note 6 de la lettre 72.
- ↑ 13. Ou de Bartillat. C’était un ancien trésorier général de la Reine mère, et un vieil ami d’Arnauld d’Andilly, qui contribua en 1665 au rappel de Pompone (voyez le volume des Mémoires de Coulanges, p. 383). Il avait sans doute quelque emploi à l’Épargne. C’est sa belle-fille dont Mme de Sévigné raconte la triste fin dans la lettre du 24 janvier 1680.