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et que j’aime parce qu’elle vous admire, avec mes filles. Enfin je suis si empressé d’en parler que j’en parlerois volontiers aux rochers (je vous prie de remarquer ma turlupinade).

Je passai dernièrement une après-dînée avec la marquise de Saint-Martin[1]. Nous passâmes légèrement sur le chapitre de toute la cour ; mais nous nous arrêtâmes sur le vôtre, que nous rebattîmes à plusieurs reprises. Vous savez quel torrent d’éloquence c’est que le sien. Je vous assure que ce qu’elle dit de vous, en y ajoutant quelques passages de l’Écriture sainte et des Pères, on en feroit bien un jour votre oraison funèbre. Pour moi, qui ne lui cédois en rien quant à l’intention, je prenois mon temps entre deux périodes pour y fourrer un trait de ma façon ; car, il faut dire la vérité, elle avoit tellement pris le dessus sur moi, que j’étois comme Scaramouche quand Trivelin ne le vouloit pas laisser parler. Conclusion, Madame : nous fîmes bien notre devoir de vous louer, et cependant nous ne pûmes jamais aller jusqu’à la flatterie[2].


  1. 13. Voyez la note de la lettre du 31 mai 1675.
  2. 14. Au lieu d’aller jusqu’à la flatterie, Bussy avait d’abord écrit : vous flatter. — À la suite de ces mots, Mme de Coligny a ajouté : « Je me suis amusé à traduire des épîtres d’Ovide. Je vous envoie celle de Pâris à Hélène et la réponse. Qu’en dites-vous ? » Voyez la note 8 de la lettre 78. — Ces deux épîtres d’Ovide traduites en vers sont au tome I de la première édition des Lettres de Bussy, p. 77-106, et dans l’Appendice du tome II de l’édition de M. Lalanne, p. 447 et suivantes.