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ennemie devant lui ; et le 27e, qui étoit samedi, il alla sur une petite hauteur[1] pour observer leur marche : il avoit dessein de donner sur l’arrière-garde, et mandoit au Roi à midi que dans cette pensée il avoit envoyé dire à Brissac qu’on fît les prières de quarante heures. Il mande la mort du jeune d’Hocquincourt[2], et qu’il enverra un courrier apprendre au Roi la suite de cette entreprise : il cachette sa lettre[3] et l’envoie à deux heures. Il va sur cette petite colline avec huit ou dix personnes : on tire de loin à l’aventure un malheureux coup de canon, qui le coupe par le milieu du corps, et vous pouvez penser les cris et les pleurs de cette armée. Le courrier part à l’instant ; il arriva lundi, comme je vous ai dit ; de sorte qu’à une heure l’une de l’autre, le Roi eut une lettre de M. de Turenne, et la nouvelle de sa mort. Il est arrivé depuis un gentilhomme de M. de Tnrenne, qui dit que les armées sont assez près l’une de l’autre ; que M. de

Lorges[4] commande à la place de son oncle, et que rien

    n’avez plus qu’à y ajouter le dernier jour de sa gloire et de sa vie. » (Édition de 1754·)

  1. 14. Près du village de Sasbach, entre Offenbourg et Bade.
  2. 15. Gabriel de Monchi, comte d’Hocquincourt, dernier fils du maréchal. Il commandait les dragons de la Reine, et fut tué, le 25 juillet, à l’attaque de l’église de Gamshusen (de Gamshurst, dit la Gazette) : il avait trente-deux ans.
  3. 16. Cette dernière lettre de Turenne est imprimée parmi les Lettres militaires de Louis XIV tome III, p. 211. C’est bien celle dont parle Mme de Sévigné, car le maréchal y annonce la mort du comte d’Hocquincourt ; mais elle n’a pas été écrite le 27 juillet ; elle est datée du 25.
  4. 17. Guy-Aldonce de Durfort, le futur beau-père de Saint-Simon et de Lauzun, le frère du maréchal de Duras (voyez tome II, p. 85, note 7), du comte de Feversham et de la comtesse de Roye. « Né troisième cadet d’une nombreuse famille, ayant perdu son père à l’âge de cinq ans, il porta les armes à quatorze. M. de Turenne, frère de sa mère, prit soin de lui comme de son fils, et dans la suite lui donna tous ses soins et toute sa confiance. » Il fut fait maréchal