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Il est difficile de m’en donner une meilleure, et qui touche plus droit à mon cœur[1] ; mais il faut tout sacrifier, et me résoudre à passer le reste de ma vie, séparée de la personne du monde qui m’est la plus sensiblement chère, qui touche mon goût, mon inclination, mes entrailles ; qui m’aime plus qu’elle n’a jamais fait : il faut donner tout cela à Dieu, et je le ferai avec sa grâce, et j’admirerai la Providence, qui permet qu’avec tant de grandeurs et de choses agréables dans votre établissement, il s’y trouve des abîmes qui ôtent tous les plaisirs de la vie, et une séparation qui me blesse le cœur à toutes les heures du jour, et bien plus que je ne voudrois à celles de la nuit. Voilà mes sentiments ; ils ne sont pas exagérés, ils sont simples et sincères ; j’en ferai un sacrifice pour mon salut. Voilà qui est fini ; je ne vous en parlerai plus, et ferai sans cesse réflexion sur[2] la force invincible de vos raisons, et sur votre admirable sagesse, dont je vous loue, et que je tâcherai d’imiter[3].

Janet alla trouver M. de Pompone à Port-Royal. Qu’il vous dise un peu comme il y fut reçu, et la joie qu’il eut de savoir que M. de Buous étoit nommé. Je laisse le plaisir à Janet de vous apprendre tous ces détails par la lettre de sa femme[4]. Voilà un billet de Mme d’Herbigny[5], qui entre plus que personne dans les affaires de Provence. Elle est aimable et très-obligeante ; elle a voulu savoir le syndicat et les gardes : voilà sa réponse sur les gardes. Elle croyoit que j’avois autant plu à son frère qu’à elle.

  1. Lettre 364. — 1. « Ni qui frappe plus droit à mon cœur. » (Édition de 1754.)
  2. 2. « Je méditerai sans cesse sur. » (Ibidem.)
  3. 3. Voyez la Notice, p. 180.
  4. 4. « La lettre qu’il écrit à sa femme. » (Édition de 1754.)
  5. 5. Sœur de M. Rouillé de Mêlai, alors intendant de Provence (Note de Perrin, 1754.)