1673
cou, lui disant qu’il devinoit bien ce qu’il avoit à lui dire ; que c’étoit le coup de sa mort, qu’il la recevoit de la main de Dieu ; qu’il perdoit le seul et véritable objet de toute sa tendresse et de toute son inclination naturelle ; que jamais il n’avoit eu de sensible joie ou de violente douleur que par ce fils, qui avoit des choses admirables : il se jeta sur un lit, n’en pouvant plus, mais sans pleurer, car on ne pleure point[1]. Le Père pleuroit, et n’avoit encore rien dit ; enfin il lui parla de Dieu, comme vous savez qu’il en parle. Ils furent six heures ensemble ; et puis le Père, pour lui faire faire ce sacrifice entier, le mena à l’église de ces bonnes capucines, où l’on disoit vigiles pour ce fils. Il y entra[2] en tombant, en tremblant, plutôt traîné et poussé que sur ses jambes[3]. Son visage n’étoit plus connoissable. Monsieur le Duc le vit en cet état[4] ; et en nous le contant chez Mme de la Fayette, il pleuroit. Le pauvre maréchal revint enfin dans sa petite chambre. Il est comme un homme condamné. Le Roi lui a écrit. Personne ne le voit.
Mme de Monaco[5] est entièrement inconsolable ; on ne
- ↑ 4. Tel est le texte de l’édition dite de Rouen (1726). Ce membre de phrase manque dans l’édition de 1725. Celle de la Haye (1726) porte : « car on ne pleure point dans cet état. »
- ↑ 5. Dans les éditions de Perrin : « Pour ce cher fils. Le maréchal y entra… »
- ↑ 6. « Que porté sur ses jambes. » (Édition de la Haye, 1726.)
- ↑ 7. « Sa Majesté a témoigné son sensible déplaisir au maréchal duc de Gramont par une lettre de sa main et par la visite que le duc d’Enghien lui a rendue de sa part. Monsieur lui a fait l’honneur de l’aller voir. » (Gazette du 9 décembre.)
- ↑ 8. Catherine-Charlotte de Gramont, sœur du comte de Guiche Voyez tome II, p. 153, note 15.
en 1604 par la duchesse de Mercœur, occupa jusqu’en 1688 une partie de l’emplacement de la place Vendôme. — L’hôtel de Gramont n’en était pas fort éloigné : il a donné son nom à la rue actuelle de Gramont, ouverte en 1767.
