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cette bonne disposition ! Vous avez raison de voir d’où vous êtes les choses comme vous les voyez ; et nous avons raison aussi de les voir d’ici comme nous les voyons. Vous croyez avoir l’avantage : nous le souhaitons autant que vous ; et en ce cas nous disons qu’il ne faut aucun accommodement ; mais supposé que l’argent, que nous regardons comme une divinité à laquelle on ne résiste point, vous fît trouver du mécompte dans votre calcul, vous m’avouerez que tous les expédients vous paroîtroient bons comme ils nous le paroissoient. Ce qui fait que nous ne pensons pas toujours les mêmes choses, c’est que nous sommes loin : hélas ! nous sommes très-loin[1] ; mais il faut se faire honneur réciproquement et croire que chacun dit bien selon son point de vue[2].

Il y a bien des gens en ce pays qui sont curieux de savoir comme vous sortirez de votre syndicat ; mais je dis encore vrai quand je vous assure que la perte de cette petite bataille ne feroit pas ici le même effet qu’en Provence. Nous disons ici en tous lieux et à propos tout ce qui se peut dire, et sur la dépense de M. de Grignan, et sur la manière dont il sert le Roi, et comme il est aimé : nous n’oublions rien ; et pour des tons naturels, et des paroles rangées, et dites assez facilement, sans vanité, nous ne céderons pas à ceux qui font des visites le matin aux flambeaux[3]. Mais cependant M. de la Garde ne trouve rien de si nécessaire que votre présence. On parle d’une trêve. Soyez en repos sur la conduite de ceux qui sauront

  1. 2. L’édition de 1754 a de plus ici ces mots : « Ainsi l’on ne sait ce qu’on dit ; mais il faut, etc. »
  2. 3. Ici encore il y a dans l’édition de 1754 une phrase qui manque dans celle de 1734 : « Que si vous étiez ici, vous diriez comme nous, et que si nous étions là, nous aurions toutes vos pensées. »
  3. 4. C’est-à-dire : Nous ne le céderons point à l’évêque de Marseille. Voyez la lettre du 24 juillet 1675.