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Quand vous irez à Orange, c’est-à-dire M. de Grignan, écrivez à M. de Louvois l’état des choses, afin qu’il n’en soit pas surpris. Ce siége d’Orange me déplaît par mille raisons. J’ai vu tantôt Mme de Pompone[1], M. de Bezons[2], Mme d’Uxelles, Mme de Villars, l’abbé de Pontcarré, Mme de Rarai : tout cela vous fait mille compliments, et vous souhaite ; enfin croyez-en la Garde, voilà tout ce que j’ai à vous dire. On ne vous conseille point ici d’envoyer des ambassadeurs ; on trouve qu’il faut M. de Grignan et vous. On se moque de la raison de la guerre. M. de Pompone a dit à d’Hacqueville que les affaires ne se démêleroient pas en Provence, et que quelquefois on a la paix lorsqu’on parle le plus de la guerre.

Voici des plaisanteries. Mme de Ra** et Mme de Bu**[3] se querelloient pour douze pistoles ; la Bu** lassée lui dit : « Ce n’est pas la peine de tant disputer, je vous les quitte. — Ah ! Madame, dit l’autre, cela est bon pour vous, qui avez des amants qui vous donnent de l’argent. — Madame, dit la Bu**, je ne suis pas obligée de vous dire ce qui en est ; mais je sais bien que quand j’entrai il y a dix ans dans le monde, vous en donniez déjà aux vôtres. »

  1. 7. « M. de Pompone. » (Édition de 1754.)
  2. 8. Claude Bazin, seigneur de Bezons, né en 1617, avait été dès 1639 avocat général au grand conseil, et devint conseiller d’État ; il fut de longues années et était probablement encore intendant en Languedoc ; en 1679 il fut, avec la Reynie, rapporteur dans l’affaire des poisons (voyez la Correspondance de Bussy, tome IV, p. 339). Il avait en 1643 remplacé Seguier (nommé protecteur) et fut lui-même remplacé par Boileau, à l’Académie française, dont il mourut doyen le 20 mars 1684. Un de ses fils, alors conseiller au parlement, passa par les mêmes charges que son père ; un autre devint maréchal de France en 1709, et le cadet évêque d’Aire, puis archevêque de Bordeaux.
  3. 9. Dans l’édition de 1734 il n’y a que les initiales R*** et B*** ; dans celle de 1754 Ra… et Bu… Il est vraisemblable que ces deux