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de son esprit agréable, mais de son esprit de bon sens. Elle se mit sur le ridicule de M. de Meckelbourg[1] d’être à Paris présentement, et je vous assure que l’on ne peut mieux dire. C’est une personne très-opiniâtre et très-résolue, et assurément de bon goût ; car elle hait Mme de Gourdon[2] à ne la pouvoir souffrir. Monsieur me fit toutes les caresses du monde au nez de la maréchale de Clérembaut[3] ; j’étois soutenue de la Fiennes, qui la hait

  1. 11. Christian, duc régnant (depuis 1658) de Mecklenbourg-Schwérin, qui après avoir divorcé d’avec sa première femme, s’était rendu à Paris, y avait embrassé (1663) la religion catholique, et avait joint à son nom celui de Louis pour plaire à Louis XIV. Il avait épousé en 1664 (voyez la note 2 de la lettre 36) la duchesse de Châtillon, qu’il ne put décider à vivre dans le Mecklenbourg et avec laquelle il séjourna presque constamment à Paris. Il mourut en 1692 à la Haye, où il s’était retiré en 1689. Madame disait au duc de Mecklenbourg lui-même, vers le temps de cette lettre, qu’elle trouvait toute sa conduite pitoyable. « C’était un singulier personnage que ce prince : il était bien élevé, il savait parler le mieux du monde, on ne pouvait lui donner tort quand on l’entendait ; mais en tout ce qu’il faisait il était pire qu’un enfant de six ans. Un jour qu’il me faisait ses plaintes, je ne lui répondis mot ; il me demanda pourquoi je ne répondais point ; je lui dis tout crûment : « Que voulez-vous que je dise à Votre Dilection ? Vous parlez le mieux du monde, mais vos actions ne répondent pas à vos discours, et toute votre conduite est pitoyable et vous fait moquer dans toute la France. » Il en prit de l’humeur et s’en alla. » (Correspondance de Madame, tome II, p. 266.) Ailleurs (p. 50 de l’édition allemande de 1789) Madame l’appelle un « fou in-folio. »
  2. 12. Henriette de Gourdon de Hontely fut longtemps dame d’atour de Madame de Bavière (voyez la lettre du 21 octobre suivant). Sur ses distractions, voyez la Correspondance de Madame, tome I, p. 217. Il paraît qu’elle avait aussi été de la maison de la première Madame, de l’amie de Mme de la Fayette : « On voit, écrit Madame de Bavière (même tome, p. 252), que cette méchante Gourdon n’a eu aucune part à cette affaire (à l’empoisonnement) ; mais elle a accusé Madame auprès de Monsieur ; elle en a dit beaucoup de mal à tout le monde, et lui a rendu tous les mauvais offices qu’elle a pu. »
  3. 13. Louise-Françoise Bouthillier, fille aînée du secrétaire d’État