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La pauvre Castellane[1] n’en pouvoit plus : elle a coupé dans le vif, non sans regrets ; mais elle étoit attendue chez ses parents ; elle s’y reposera et y attendra son mari. Pour moi, je commence à respirer :j’ai mis des barbons à la place de tous ces enfants ; du jeu à celle des bals ; du bœuf et du mouton à celle des cailles et des mets délicats : cet échange soulagera l’esprit et la bourse. Le Grand Prieur part enfin :il vint hier prendre son audience de congé, et j’irai demain prendre la mienne. Pendant que je me reposerai, vous allez donc vous fatiguer, et chacun aura sa corvée : une noce, un Simiane, une intendante, Montélimar, un avenir bien brillant. Quelle espèce de fantaisie est donc celle de cette Madame de venir voir le bas Dauphiné ? Mon beau-frère est enchanté du mariage qu’il prétend avoit fait, et surtout de revenir à Vauréas. Il m’a écrit des merveilles de ce qu’il appelle son ouvrage. Je voudrois savoir s’il a fait quelque présent considérable : mandez-le-moi, ma chère cousine, je vous en prie, aussi bien que la relation de vos fêtes et de vos plaisirs, et si vous vous serez bien tirée d’affaire ; je n’en doute pas, mais quelquefois le succès dépend de la situation des esprits, des idées que l’on se fait, et enfin de tant de choses, qu’avec une grande volonté et des talents on ne parvient pas à divertir son monde. Voilà le triomphe de Mazargues, c’est qu’en se mettant à la fenêtre et en rassemblant le peuple avec un tambourin, on est presque sûr de son fait :je ne crois pas que les atomes de Montélimar soient si chargés de gaieté. Vous souvientil de la petite fleur? mon Dieu !nous ne laissions pas de

    lettre est de 1727, et rien d’ailleurs n’empêchant de croire qu’elle ait été écrite vers le temps de la précédente, nous les rapprochons l’une de l’autre.

  1. 4. Sans doute la fille de Mme de Simiane voyez ci-dessous, p. 41, note 2.