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1691 plaisir de vous voir, je l’achèterois trop cher, si c’étoit à vos dépens. Je vous mandai il y a huit jours la vérité de mon état : j"étois parfaitement bien, et j’ai été, comme par miracle, quinze jours sans vapeurs, c’est-à-dire guérie de tous maux. Je ne suis plus si bien depuis trois ou quatre jours, et c’est la seule vue d’une lettre cachetée, que je n’ai point ouverte, qui m’a ému mes vapeurs. Je ressemble comme deux gouttes d’eau à une femme ensorcelée ; mais l’après-dînée je suis assez comme une autre personne :je vous écrivis, il y a un mois ou deux, que c’étoit ma méchante heure, et c’est à présent la bonne ; j’espère que mon mal, après avoir tourné et changé, me quittera peut-être ; mais je demeurerai toujours une très-sotte femme, et vous ne sauriez croire comme je suis étonnée de l’être ; je n’avois point été nourrie dans l’opinion que je le pusse devenir. Je reviens à votre voyage, ma belle :comptez que c’est un château en Espagne pour moi que d’imaginer le plaisir de vous voir ; mais mon plaisir seroit troublé si votre voyage ne s’accordoit pas avec les affaires de Mme de Grignan et avec les vôtres. Il me paroît cependant, tout intérêt à part, que vous feriez fort bien de venir l’une et l’autre ; mais je ne puis assez vous dire à quel point je suis touchée de la pensée de revenir uniquement à cause de moi. Je vous écrirai plus au long au premier jour.


1336. — DE MADAME DE LA FAYETTE À MADAME DE SÉVIGNÉ ET À MADAME DE GRIGNAN.

Paris, mercredi 10e octobre.
à madame de sévigné.

J’ai eu des vapeurs cruelles, qui me durent encore, et