Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 10.djvu/580

Cette page n’a pas encore été corrigée

ver que j'ai fait toutes mes diligences envers elle ; et comme ceux qui bàtissent, je m’occupe moins de voir ma maison faite, que de la faire.

Le siècle s’est tourné â ne recevoir de sainteté que dans une vie privée et tout à fait simple, c`est-à-dire dans des gens si obscurs, qu’on ne les ait point vus. Madame votre fille[1] aime aussi peu de gens que si elle étoit dans le plus grand monde ; mais elle les aime autant qu’une religieuse sait aimer.

Le ministre d’aujourd’hui[2] ne gagne pas moins qu’un autre à la mort du prince d’Orange[3] : quelle épine hors du pied de tout le monde ! car je trouve que les ennemis gagnent autant que nous à la mort, d’un perturbateur du repos public. J'admire sa vie ; mais je suis bien aise qu'elle soit finie, non-seulement comme François, mais comme homme.

Il est plus ordinaire et plus facile à l’homme d’avoir de fausses vertus, que de produire des actions contre nature : ainsi permettez-nous de douter de la sincérité des regrets de Monsieur de Cambrai[4].

Il n’est pas en moi, Madame, de refuser une occasion de`vous écr1re : je crois toujours avoir mille choses à vous dire ; et à bien démêler ce sentiment-là, je sens

  1. 1. Marie-Blanche sans doute.
  2. 2. M. de Chamillart, qui succéda (en novembre 1700) à M. de Barbesieux. (Note du Mercure.)
  3. 3. Guillaume III était mort le 19 mars 1702.
  4. 4. Sur la mort de Monsieur de Meaux. (Note du Mercure.} — Bossuet était mort le 12 avril I704.