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poésie, Madame la marquise. Pour moi, qui ai des raisons secrètes de parler de mon chef, je répondrai en mon petit particulier, et me sers des premières forces d’une pauvre tête qui a été un peu ébranlée[1] et que l'ouvrage que j'entreprends n'est guère propre à raccommoder, pour chanter :

Quand vos aimables vers nous élèvent un buste, Vous échauffez ma veine au milieu des glaçons, Et vous en cueillerez les premières moissons : Excusez si ma voix n’est pas assez robuste. Vous auriez pu briller dans le siècle d’Auguste.· Chez vous du savoir-vivret on donne des leçons, Marquise ; et ce n’est point vous conter des chansons Que trouver votre esprit des esprits le plus juste. Votre amitié suffit pour donner de l'orgueil ; Mériter près de vous un favorable accueil, C’est aux plus grands chagrins opposer une digue. Pour plaire il vous fallut peu jouer de ressorts ; Si de faveurs pour moi l’on vous eût vu prodigue, L’on me verroit encor dans mes premiers transports[2]

  1. LETTRE 16 (revue sur une ancienne copie). -- 1. On pourrait supposer d’après ceci que cette lettre a été écrite quelque temps après la chute que le comte de Griguan fit à Sorgues en 1694, pendant le dernier séjour de Mme de Sévigné à Grignan (voyez ci-dessus, p. 199). Mais les bouts-rimés qui la terminent nous portent à croire qu’elle est plutôt d’une époque antérieure : au moins ne voyons-nous pas qu’en 1694 on s’amusât encore à rimer au château de Grignan, comme on le faisait en 1673, en 1678 et en 1690 (voyez tome III, p. 337 et note 17 ; tome V, p. 440 et note 7 (où nous avons fait la promesse, que nous tenons ici, de donner un échantillon des bouts-rimés du comte de Grignan) ; et tome IX, p. 540 et 541).
  2. 2. Le manuscrit où cette lettre a été conservée contient, à la suite de ces b0uts—rimés’, d’autres· vers sur les mêmes rimes, non moins insignifiants qui très-probablement ne sont pas du comte de Grignan, mais de quelque autre personnes de sa famille ou d’un de ses hôtes.