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1691 ger[1]. Je vous écris le 20e mai, vous me faites réponse le 12e juillet, et je la reçois le 8e août : voilà qui est bien languissant pour des gens aussi vifs que nous sommes. Je suis bien fâché de la mort des pauvres Beaulieus, quand ce ne seroit que parce qu’elle est cause que j’ai attendu plus longtemps le plaisir de recevoir de vos nouvelles.

Au reste, ma chère cousine, la peinture que vous me faites[2]de la vie que vous menez en Provence me donne une grande envie d’être avec vous autres. Je voudrois avoir eu une raison d`aller prendre des eaux, comme a eu M. de Sévigné ; car vraisemblablement ce n`est pas pour un mal fort douloureux, puisque vous vous trouvez respectivement de bonne compagnie les uns et les autres. Je m`en vais vous dire aussi ce que j`ai fait depuis trois mois. J`ai passé tout le mois de juin auprès de Monsieur le Prince[3]; vous en savez la raison. Il n`y a jamais eu tant de noblesse aux états de cette province que cette année. Le prince a eu pour moi tous les égards que je pouvois souhaiter et huit jours avant qu’il partît de Dijon, je lui donnai le mémoire que je vous envoie. Comme je savois qu`il ne s’engageoit pas de si loin, je lui dis en lui donnant ce mémoire que je le suppliois de le lire à son loisir, et que je ne lui en demandois de réponse que quand il lui plairoit. Depuis que je le lui eus donné, il ne me dit rien sur ce sujet, mais il redoubla de caresses et d`agréables traitements : ainsi je crois que

  1. 2. « Mais quand avec cela le commerce est difficile, comme est celui de Provence ici, c’est ce qui fait enrager. » (Édition de 1697.)
  2. 3. Les mots : « que vous me faites, » ont été ajoutés par Bussy, au-dessus de la ligne ; de même que, cinq lignes plus bas et devant les autres .
  3. 4. Le prince de Condé était gouverneur de la province de Bourgogne, dont il était venu présider les états.