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volontés de Dieu. Nous ne laissons pas d’agir librement, nous voulons faire ce que nous faisons : il est le maître de nos volontés, il nous les tourne comme il lui plaît ; quand elles sont bonnes, elles viennent de la grâce ; quand elles sont mauvaises, ce sont des abandonnements , que nous méritons toujours, puisque Dieu n'est point obligé de nous tirer de notre misère qu'autant qu`il lui plaît, gratuitement, par bonté : ainsi nous ne devons jamais nous plaindre.

Il faut regarder tous les maux qui sont dans le monde, toutes les hérésies, tous les aveuglements, tous les meurtres, comme des volontés souveraines dont il sait tirer tous les biens qu’il lui plaît, et qui pour nous être inconnues n`en sont pas moins dans l’ordre de sa providence. Je suis au désespoir d`avoir donné liberté à ma plume de parler sur ce sujet : vous me désapprouverez, et je hais toujours de vous déplaire. Je parlerois longtemps sur ce chapitre, mais je me sais fort bien taire aussi.


  • 3. -- DE MADAME DE SÉVIGNÉ A MADAME

DE GRIGNAN[1].

JE gardois cette feuille pour mon fils, mais il est en compagnie ; et comme vous êtes pointilleuse et difficile. je craindrois que vous ne voulussiez encore interpréter mon apostille : de sorte, ma bonne, que je veux vous dire encore que vous avez sans contestation cette place dans mon cœur comme vous le pensez ; mais il n`est pas

  1. LETTRE 3. -- 1. Ce fragment, qui a été publié par M. Corrard de Breban, est très-probablement de l'année 1689 ou de 1690. Voyez les lettres, écrites aux Rochers, du 22 janvier 1690, tome IX, p. 423 et suivantes, particulièrement p. 427, et du I2 février 1690, même tome, p. 455 et 456.