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que répondre ; Monsieur l’ambassadeur y pensera, s’il lui plaît. ll est vrai que mes pauvres lettres n’ont de prix que celui que vous y donnez en les lisant comme vous faites ; car elles ont des tons, et ne sont pas supportables quand elles sont anonnées ou épelées ; quoi qu’il en soit, mon cher cousin, vous leur faites cent fois plus d’honneur qu’elles ne méritent.


1329. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À COULANGES.

[À Grignan, 26e juillet.]

Voilà donc M. de Louvois mort, ce grand ministre[1], cet homme si considérable, qui tenoit une si grande place, dont le moi, comme dit M. Nicole, étoit si étendu, qui étoit le centre de tant de choses ! Que d’affaires, que de desseins, que de projets, que de secrets, que d’intérêts à démêler, que de guerres commencées, que d’intrigues, que de beaux coups d’échecs à faire et à conduire ! « Ah ! mon Dieu, donnez-moi un peu de temps : je voudrois bien donner un échec au duc de Savoie, un mat au prince d’Orange. — Non, non, vous n’aurez pas un seul, un seul moment. » Faut-il raisonner sur cette étrange aventure ? En vérité, il faut y faire des réflexions[2] dans son cabinet. Voilà le second ministre[3] que vous voyez mou-

  1. Lettre 1329 revue sur une ancienne copie. — 1. Tel est le commencement de la lettre dans la copie que nous suivons (voyez ci-dessus, p. 39, note 1). Dans l’édition de 1751, elle commence par ce début, qui pourrait bien être de la composition du premier éditeur : « Je suis tellement éperdue de la nouvelle de la mort très-subite de M. de Louvois, que je ne sais par où commencer pour vous en parler. Le voilà donc mort, ce grand ministre, etc.
  2. . « Non, en vérité, il y faut réfléchir, etc. » (Édition de 1751.)
  3. 3. Seignelai était mort l’année précédente. Voyez la lettre du 13 novembre 1690, tome IX, p. 582 et 583.