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1496. -- DE MADAME DE COULANGES ET DE COULANGES A MADAME DE GRIGNAN.

A Ormesson, le 7è juillet.

` DE MADAME DE COULANGES.

JE ne suis point contente, Madame, de la manière dont vous me parlez de votre retour : il me paroît que la saison de Noël vous fait peur ; pour moi, je suis persuadée que le printemps et l'été n`arriveront qu’alors ; depuis trois semaines que j’habite ma solitude, je n'ai eu qu’un seul beau jour : les vents sont déchaînés , les pluies continuelles, tous les biens de la terre perdus ; voilà les événements qui nous occupent le plus. Cependant celui de la petite victoire de M. le maréchal de Boufflers est [1]venu jusques à nous ; il étoit temps qu’il fît parler de lui, et que l’on se souvint que le maréchal de Villars n`est pas le seul conquérant que nous ayons. Nul bonheur sans mélange dans ce monde : la passion de ce dernier pour sa femme est au-dessus de celle qu’il a pour la gloire, et sa délicatesse lui persuade que la gloire le traite mieux [2]. Sa mères[3] est charmante par ses mines, et par les petits discours qu’elle commence, et qui ne sont entendus que

  1. LETTRE I496. -- 1. Le combat d’Ekeren, donné le 30 juin 1703- (Note de l'édition de 1751.) Voyez le Journal de Dangeau, au 3 juillet 1703.
  2. 2. On lit dans Saint—Si1non (tome IV, p. 32) «  Je ne dis rien du ridicule extrême de ses jalousies et des voyages de sa femme traînée sur les frontières : il faut voiler ces misères ; mais il est triste qu’elles influent sur l’État et sur les plus importantes opérations de la guerre, comme la Bavière le lui reprochera à jamais. (Voyez ci-dessus, p. 477, note 8.) Et dans le Journal de Dangeau, au 14 mai I703 : M. le maréchal de Villars souhaitoit que Madame sa femme passât en Bavière, et il avoit donné tous les ordres pour cela, mais le Roi ne l’a pas jugé à propos, et l’on croit qu’elle reviendra à Paris. »
  3. 3. Voyez la Notice, p. 156 ; tome I, p. 512, note I2 ; tome II, p. 52, note 3 ; et Saint-Simon, tome V, p. 195.