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réussir ses projets ; elle a un fils aîné, qui est un fort grand seigneur dans son pays, et un petit, beau comme le jour, qu`elle prétend établir en France sous le nom de marquis de la Trousse, avec ses deux belles terres de la Trousse et de Lisy(II); elle ne trouve nul obstacle du côté de sa mère, qui lui a, je crois, assuré tout son bien ; c`est une très-habile femme que Mme de la Cisterne ; je la regrette, elle nous quitte après un voyage de huit jours qu`elle va faire à la Trousse. Elle vous plairoit, Madame : elle a un esprit bon et naturel : je pense qu`elle pourra bien se venir établir en France dans quelques années ; mais je ne prends plus aucune part dans les projets éloignés. Nous sommes ici dans l'agitation du jubile. Cette dévotion n`est point dans les principes du quiétisme, car il se faut donner bien du mouvement. Le Roi viendra trois jours de suite à Notre-Dame(I2), à commencer jeudi, et s’en retournera à Meudon ; Monseigneur y est venu ces jours-ci ; enfin, Madame, tout le monde est dans la ferveur, jusqu`à M. de Coulanges, qui avant que d`aller courir les rues, m'a fort priée de vous assurer de ses respects. Je ne puis vous dire, Madame, à quel point je sais vous honorer et vous aimer ; mais les absences sont trop longues, je ne les trouve point proportionnées à la brièveté de la vie ; et vous jugez bien, Madame, par la tristesse de cette réflexion, de tout l’ennui que me cause votre éloignement.

11. La Trousse et Lisy sont voisins, à trois lieues de Meaux et quatorze de Paris. Voyez tome III, p. 132, note 5.

12. Le Roi ne vint à la cathédrale que le premier jour des stations ; il alla les deux autres jours dans d’autres églises. Voyez le Journal de Dangeau, aux 6 et 8 avril 1702.