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1486. -- DE MADAME DE COULANGES A MADAME DE GRIGNAN.

A Paris, le 30è juillet.

Tour ce que vous me faites la grâce de me dire est vrai, Madame ; cependant on ne sauroit s’imaginer ce que la nature, soutenue du spectacle, m'a fait souffrir[1] ; l'impression qui m'en est restée est si vive, que je n’en puis revenir, malgré tout ce que la raison peut fournir de consolation ; j’espère en la diversion que je n’ai point encore éprouvée, car je n`ai vu personne dans cette triste conjoncture. Je ne vous fais point d`excuses de n`avoir pas fait réponse à votre lettre : vous jugez aisément, Madame, de ce qui m`en a empêchée, et combien j’avois renoncé à mes plaisirs, puisque je m’étois retranchée celui de vous entretenir.

M. de Coulanges est à Versailles ; on vient de me dire qu’il vit hier Mme de Maintenon chez Mme de Saint-Géran, et qu'il en avoit reçu des amitiés infinies ; il a mandé cette heureuse rencontre à Mme de Louvois : c'est une chose raisonnable que les secondes femmes soient mieux traitées que les premières, et je suis assez juste pour ne me point plaindre de la préférence que M. de Coulanges donne à Mme de Louvois. Que dites-vous de la mort de la duchesse d`U*.[2] Pour moi, je voudrois qu’on fit un exemple de tels assassinats ; on dit cependant que la presse est grande à qui épousera ce joli héros [3]: ô grand pouvoir du tabouret ! Le Roi est

  1. LETTRE 1486. -- I. Mme de Coulanges avait sans doute perdu sa mère : voyez le commencement de la lettre du 19 avril précédent, p. 450.
  2. 2. La duchesse d’Uzès. Elle était morte en couches. Voyez ci-dessus. 340, note 8.
  3. 3. Le duc d’Uzès se remaria, comme nous l’avons dit, en 17o6, avec Anne-Marie-Marguerite de Bullion.