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considérer l'état où je suis et à qui j`ai à faire [1]puisque j`ai à me justifier sérieusement sur ce qu’il[2] plaît à Monsieur de Nantes de rêver. Car enfin, Monseigneur, où sont les démarches que j'ai faites pour avoir cette prétendue préséance ? auquel de Messieurs les ministres ai-je eu l`honneur d’en écrire ? Quelque considérable que Mgr le comte de Toulouse soit dans l'Ètat, il ne décide pas de ces sortes de difficultés ; le temps étoit trop court pour examiner à l`armée[3] les droits des parties : il s'ensuit de là nécessairement, ou que je suis devenu entièrement imbécile, ou que l`on a voulu très-méchamment m'imposer une extravagance, pour me tourner en ridicule : personne ne peut être à couvert d`une telle aventure. Je craindrois de dire des vérités avec la même hardiesse que notre pieux évêque dit ses imaginations. Par exemple, Monseigneur, que penseriez-vous de moi si je me donnois l'honneur de vous écrire en tant que ministre, et pour le dire au Roi, que Monsieur de Nantes, le 27e du mois de juin dernier, m'appela en duel, bien régulièrement et dans toutes les formes prescrites, et que le 9è de juillet suivant, le même prélat parut à deux heures après midi, la soutane retroussée sous le bras gauche et l’épée nue à la main droite, jurant comme un soldat aux gardes, sur ce que son valet de chambre avoit pris querelle dans la place de Saint-Pierre ? Cependant, Monseigneur, toute la ville de Nantes, sans excep-

  1. 12. C’est là l'orthographe de l'original.
  2. 13. La lettre avait été collationnée tout entière avec l'autographe pour l’éditi0n de 1818. Nous n’en avons retrouvé que les quatre premières pages ; la quatrième finit à : « sur ce qu’il.»
  3. 14. Le comte de Toulouse servit cette année-là dans l’armée de Flandre : il fut fait lieutenant général au commencement du mois d’aoùt, et dut être rappelé peu de temps après : voyez Dangeau au 6 août 1697.