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fâchée d`avoir ignoré si longtemps le séjour de M. de Simiane en ce pays-ci ; le hasard me l`a fait trouver à dîner chez M. de Saint-Amant ; il m`a fait ensuite l`honneur de me venir voir deux fois : il m`a paru tout comme il vous paroît, je ne crois pas peu dire ; il a bien raison d’être pour vous comme il est ; j`avoue que cela m`a fait un sensible plaisir ; je n'aime point qu`on ignore de tels bonheurs. Ah ! Madame, que ne ferait point notre pauvre Mme de Sévigné dans une pareille occasion ! Le malheur de ne la plus voir m'est toujours nouveau ; il manque trop de choses à l'hôtel de Carnavalet ; je ne saurois m'empêcher de vous désirer ; et toute votre indifference pour ce pays-ci ne m'en peut inspirer pour votre retour ; je le souhaite, comme si j'étois d'âge à en profiter ; mais il me semble que mon inclination si naturelle pour vous vous fait souffrir mon âge avec quelque bonté. J`ai eu la conduite que vous m'aviez prescrite au sujet de votre lettre ; cependant je vous avouerai, Madame, que je l'ai montrée à Mme de Chaulnes, qui m`a fait promettre de vous dire de sa part qu`elle vous approuve, autant qu`elle désapprouve .... je ne dirai pas qui[1]. Savez-vous que Mme de Chaulnes a un nouveau mérite à mon égard ? c'est celui de ne se point du tout consoler de la perte de Mme de Sévigné : nous en parlons sans cesse ; car pour moi, c`est ma manière, j`aime à parler de ce que j'ai aimé, et à ne me point ménager sur les souvenirs qui me sont chers.

Je fis une longue réponse à une lettre que vous m'avez fait l`honneur de m`écrire avant la dernière ; je la donnai à Madame votre mère, et ma lettre s`est trouvée perdue : je vous le dis, Madame, afin que vous ne me soupçon-

  1. LETTRE 1476. -- 1. M. de Simiane ? voyez vers la fin de la lettre, et la note 4.