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chement, quelle intime union, quels liens ont été brisés ; 1l ne se peut sentir de plus cruelle séparation ; elle m`étonne comme le premier jour, et me paroît, s`il se peut, plus dure, plus amère. Mon esprit appuie présentement davantage sur chaque circonstance, et il semble que les pointes de la douleur me pénètrent plus vivement. Une perte si complète et si irréparable ne porte pas à chercher de soulagement que dans les larmes et les regrets. Je n'ai point la force de lever les yeux assez haut pour trouver de plus solides consolations. Je ne puis encore tourner mes regards qu`autour de moi et m'occuper de ce que je n'y vois plus. Et comment s`accoutumer à la privation d'une personne à qui je dois tout, qui m`a comblée de biens, dont je recevois tous les jours de nonvelles marques de tendresse, dans l'agrément de la société, et qui réunissoit en elle tous les différents caractères qui pouvoient me la rendre plus chère et plus précieuse Vous sentez, Monsieur, la peine d’être privé du commerce et de la fidèle amitié d’une amie si estimable : jugez par vos sentiments quels doivent être les miens, et combien je mérite votre pitié. Je suis, Monsieur, avec une parfaite estime et un sincère respect, votre très-humble et très-obéissante servante,

La comtesse de Grignan.

A la Garde, ce 15 juillet.

Mme de Grignan avec son frère. Cette réponse fut probablement faite par le chevalier de Grignan au nom de sa belle-sœur : voyez ci-après, p. 403, la seconde lettre de le Camus, du 26 juillet.

LETTRE 1463 (revue sur l’autographe). --I. Mme de Grignan répète ici en partie ce qu’elle écrivait au président de Moulceau le 28 avril. Voyez ci-dessus, p. 387.