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plus digne de notre admiration que de nos regrets, c’est une femme Forte. Elle a envisagé, dès les premiers jours de sa maladie, la mort, avec une fermeté et une soumission étonnantes. Cette femme si tendre et si foible pour tout ce qu'elle aimoit, n'a trouvé que du courage et de la religion, quand elle a cru ne devoir songer qu'à elle. Nous avons du remarquer par l`usage qu’elle a su faire des bonnes provisions qu’elle avoit amassées, de quelle utilité et de quelle importance il est de se remplir l’esprit de bonnes choses, et deces saintes lectures pour lesquelles Mme de Sévigné avoit une avidité surprenante. Je vous rends compte de tous ces détails[1], Monsieur, parce qu’ils conviennent à vos sentiments et à l'amitié que vous aviez pour celle que nous pleurons. Je vous avoue que j’en ai l'esprit si rempli, que c’est un soulagement pour moi ! de trouver un homme aussi propre que vous à les écouter et à les aimer. J’espère, Monsieur, que le souvenir d`une amie qui vous estimoit infiniment contribuera à me conserver l`amitié[2] dont vous m'honorez depuis longtemps : j'en fais trop de cas et je la souhaite trop pour ne pas la mériter un peu.

Faites-moi la grâce d'être toujours bien persuadé,

  1. 4. « .... ne devoir songer qu’à elle, et nous avons dû remarquer de quelle utilité et de quelle importance il est de se remplir l’esprit de bonnes choses et de saintes lectures, pour lesquelles Mme de Sévigné `avait un goût, pour ne pas dire une avidité surprenante, par l’usage qu’elle a su faire de ces bonnes provisions dans les derniers moments de sa. vie. Je vous conte tous ces détails, etc. » (Édition de 1773.)
  2. 5. L’éditeur de 1773 a remplacé ces mots : «  me conserver l'amitié, » par : « me conserver dans l’amitié » ; à la ligne suivante, il a mis : je l'estime et la souhaite trop ; :> et il a substitué au dernier paragraphe de la lettre ce commencement de phrase : « J’ai l'honneur, etc.