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roula notre conversation. Je lui fis voir la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire ; elle lui fit un vrai plaisir ; car ces sortes de gens-la sont si persuadés que cette vie-ci ne doit servir qu'à s`assurer l`autre, que les dispositions dans lesquelles on quitte le monde sont les seules dignes d`attention pour eux ; mais on songe à ce que l'on perd, et on se pleure. Pour moi, il ne me reste plus d`amie ; mon tour viendra bientôt, cela est raisonnable ; ce qui ne l'est guère, c'est d'entretenir une personne de votre âge de si tristes et si noires pensées : votre raison fait oublier votre jeunesse, Madame ; et cela, joint à l'inclination naturelle que j'ai pour vous, m'autorise, ce me semble, à vous parler comme je fais. 1456. -- DU COMTE DE GRIGNAN

A MONSIEUR DE POMPONE.

Le 7 mai, à Grignan, 1696.

Vous comprenez si bien, Monsieur, tout ce que l’on peut sentir dans la perte que nous venons de faire, et vous y entrez si sincèrement et pour vous et pour moi, que je me trouve obligé de joindre aux très-humbles remerciements que je dois a vos bontés, un compliment particulier sur votre douleur. En vérité, Monsieur, toutes les personnes qui étoient attachées à Mme de Sévigné par les liens du sang et de l`amitié sont bien à plaindre, et surtout celles qui ont pu connoître dans les dernières journées de sa vie toute l'étendue de son mérite et de sa solide vertu. J’aurai l'honneur quelque jour de vous conter des détails sur cela, qui attireront votre admiration.

Faites-moi la grâce d'être toujours bien persuadé,