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pendant et qui réjouit autant le duc son père qu’il afflige le marquis de Richelieu[1] ; mais vivra-t-il ? cela est bien douteux. Nous n’avons aucunes bonnes nouvelles d’Angleterre ; nous courons le risque de revoir bientôt le roi Jacques[2]. On prétend que le prince d’Orange a toujours été fort bien instruit et qu’il n’a pas fait semblant de l’être, pour nous faire donner dans le piège. Sa flotte étoit hier si près de Calais, qu’on n’attendoit que le moment qu’elle viendroit brûler tous nos bâtiments et bombarder Calais. Ce moment fatal pour nous dépendoit de la marée ; on dit que toutes nos frégates sont en sûreté sous le risban[3] de Dunkerque ; nous en serons incessamment mieux informés.

Adieu Mesdames : vous n’en saurez pas davantage pour aujourd’hui ; et c’est beaucoup, quoi que vous en puissiez dire ; car mes lettres ne sont pas aussi merveilleuses que vous voulez me le faire accroire. Je vous attends tou-

    passè, l’Acadén1ie françoise complimenta M. le duc de Richelieu sur la naissance du duc de Fronsac son fils. M. Charpentier, doyen et chancelier de la compagnie et M. l’abbé Têtu furent chargés de ce compliment, et de présenter en même temps à ce duc un exemplaire du Dictionnaire de l’Académie françoise, ce qui fut recu avec beaucoup de ressentiment. »

  1. 8. Neveu du duc ; voyez tome VII, p. 199, note 12.
  2. 9. Jacques II était parti de Saint—Germain le 28 février précédent dans l’espoir qu’un mouvement allait s’opérer en sa faveur. On avait réuni quatre à cinq cents bâtiments de transport. Des troupes furent dirigées sur Calais et sur Dunkerque, mais elles ne devaient s’embarquer que si l’on apprenait qu’il y eût un soulèvement. Cette tentative n’eut aucune suite ; le prince d’Orange, qui était sur ses gardes, fit arrêter plusieurs seigneurs, et le roi Jacques revint à Paris. Voyez le Journal de Dangeau, aux 28 février, 7 et 10 mars 1696, et le Mercure de février, p. 324 et suivantes.
  3. 10. « Risban (en allemand RissbanK), terme de fortification, pour signifier un terre-plein pour mettre des batteries à la défense d’un port. Le risban de Dunkerque, bâti par Louis XIV, au milieu des jetées fut démoli à la paix de 1712. » (Dictionnaire de Trévoux.)