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de coulanges.

Votre amie a pris aujourd’hui la place de l’Aurore ; je ne l’ai jamais vue plus belle ni avec un teint qui marquât plus de santé. Cependant c’est après deux jours d’expériences qu’elle a faites avant-hier, à dîner, à l’hôtel de Chaulnes, et hier au soir, à souper, chez M. de Lamoignon ; enfin, c’est tout vous dire, elle a hasardé une tranche, petite à la vérité, de canard d’Amiens, et un doigt de vin de Saint-Laurent ; ne la voilà-t-il pas bien avancée ? Mais revenons à nos moutons : il y eut jeudi[1] un grand bal au Palais-Royal, où tous les masques furent admis, et ils y apportèrent la confusion ordinaire. J’assistai avec Mme de Coulanges à la parure de Mmes de Villeroi et de Barbesieux, dont je fus ébloui ; ce que je vis encore, que ne vit pas Mme de Coulanges, ce fut Mlle de Tourpes[2] avec un habit de velours couleur de feu si magnifique qu’il défie la description. Quand Mmes les maréchales de Villeroi et d’Estrées, suivies de ces trois infantes, furent parties de chez Mme de Louvois, à onze heures du soir, pour se rendre au Palais-Royal, je restai encore une heure et demie au lansquenet et puis je me fis ramener par Mme de Varangeville[3] chez moi,

  1. 4. ou plutôt le mardi 24, d’après le Journal de Dangeau.
  2. 5. Élisabeth-Rosalie d’Estrées, dite Mlle de Tourpes. Elle était fille du maréchal. C’est elle sans doute qui, restée vieille fille, épousa en 1722 un gentilhomme provençal, Laurent d’Ampus. Voyez Saint-Sîmon, tome XIX, p. 311.
  3. 6. Une des deux filles d’Honoré Courtin (tome VI, p. 201, note 45). Elle était veuve depuis octobre 1692 d’un ancien secrétaire de Monsieur, dont Saint-Simon dit (dans une addition au Journal de Dangeau, 24 octobre 1692) : « Ce Varangeville s’appeloit Rocq. C’étoit un homme de rien, fort riche, de Normandie, qui fut ambassadeur à Venise, où ses deux filles naquirent, qui depuis sa mort épousèrent le président de Maisons (ci-dessus, p. 158, note 5), et le fils de Villars, qui depuis la fit maréchale, duchesse, etc.  » Elle