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Monsieur, sur le mariage de Mme de Simiane, qui ne sont proprement que d’avoir extrêmement approuvé ce que ma fille a disposé dans son bon esprit il y a fort longtemps. Jamais rien ne sauroit être mieux assorti : tout y est noble, commode et avantageux pour une fille de la maison de Grignan, qui a trouvé un homme et une famille qui comptent pour tout son mérite, sa personne et son nom, et rien du tout le bien[1] ; et c’est uniquement ce qui se compte dans tous les autres pays : ainsi on a profité avec plaisir d’un sentiment si rare et si noble. On ne sauroit mieux recevoir vos compliments que M. et Mme de Grignan les ont reçus, ni conserver pour votre mérite, Monsieur, une estime plus singulière. Nous n’avons qu’un sentiment sur ce sujet, et vous avez fait dans nos cœurs la même impression profonde que vous dites que nous avons faite sur vous : ce coup double est bien heureux ; c’est dommage qu’on ne s’en donne plus souvent des marques. Votre style nous charme et nous plaît, il vous est particulier, et plus que nous ne saurions vous le dire, dans notre goût : c’est dommage que nous n’ayons encore quatre ou cinq enfants à marier ; il est triste de penser que nous ne reverrons jamais une seule de vos aimables lettres. Les traits que vous donnez à celle qui cache la moitié de son esprit et au degré de parenté de l’autre nous font voir que vous seriez un bon peintre, si c’étoit encore la mode des portraits[2].

C’est à vous, Monsieur, qu’il faut souhaiter une longue ’

  1. 2. Mme de Simiane n’eut en mariage qu’une dot peu considérable. Voici ce qu’en dit Dangeau : « On mande de Provence que le marquis de Simiane a épousé Mlle de Grignan ; il a vingt-cinq mille livres de rente en fonds de terre ; la demoiselle n’a que vingt mille écus ; mais elle est fort jolie ; les terres des Simianes et des Grignans se touchent. » (Journal de Dangeau, au 2 décembre 1695.)
  2. . Comme du temps de la jeunesse de Louis XIV, à la cour de Mademoiselle de Montpensier.