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1695 a point de jours qu’elle ne me demande des nouvelles de Mlle de Grignan, et qu’elle ne lui souhaite tous les biens et les maux qu’elle a. L’on dit que le maréchal de Lorges se porte mieux, et on n’appelle plus sa maladie une apoplexie ; la maréchale, qui l’est allée trouver, va avec lui aux eaux de Plombières. Tout le monde croit le mariage de M. de Lesdiguières fait avec Mlle de Clérembault[1] : le charme que Mme de Lesdiguières trouve dans ce mariage, c’est qu’elle n’aura point son fils avec elle. Le monde dit aussi celui de Mlle d’Aubigné avec le fils de M. de Noailles[2] et je crois qu’en cette occasion le monde dit vrai. Au reste, ma très-belle, j’ai à vous apprendre que l’abbé Têtu est charmé de Mme de Kerman, et qu’il se plaint hautement de toutes ses amies, de ne lui avoir pas fait connoître ce mérite-là plus tôt. On parle fort ici de la solitude de Mme la marquise de Grignan ; on dit que sa vie n’est pas soutenable, parce qu’il ne faut voir

  1. 6. Ce mariage ne se fit point. Jean-Francois-Paul, duc de Lesdiguières, né en 1678, épousa le 16 janvier 1696 Louise-Bernardine de Durfort de Duras, fille du maréchal duc et de Marguerite-Felice de Lévis de Ventadour. Il mourut à Modène, le 6 octobre 1703, sans postérité ; sa veuve ne se remaria point, et, malgré les plus vives instances, refusa la main du duc de Mantoue. Quant à Mlle de Clérembault, voyez ci-dessous, p. 354, note 5. — Le duc de Lesdiguières, dit Saint-Simon (tome IV, p. 184), « s’étoit extrêmement distingué et fait aimer et estimer en Italie. Le Roi le regretta fort... C’étoit un homme doux, modeste, gai, mais qui se sentoit fort et qui n’avoit pas plus d’esprit qu’il n’en falloit pour plaire et réussir à notre cour. Fort honnête homme et fort magnifique, il vivoit très-bien avec sa femme, qui en fut fort affligée. »
  2. 7. Adrien-Maurice, comte d’Ayen, né en 1678, mort en 1766, duc de Noailles en 1704, par démission de son père, maréchal en 1734, épousa en effet, mais seulement le 1er avril 1698, Françoise d’Aubigné, fille unique du frère de Mme de Maintenon, morte le 6 octobre 1739. Voyez le Journal de Dangeau, au 1er avril 1698. Le Mercure d’avr1l 1698, p. 215 et suivantes ; et les Mémoires de Saint-Simon, tome II, p. 113 et suivantes.